Politiques
d'armement.
Donald Trump et la Chine. Ne pas aller trop loin.
Jean-Paul Baquiast 02/01/2017
Donald Trump a gagné un certain nombre de voix favorables
aux dernières élections en annonçant
qu'il ne ferait désormais aucune concession à
la Chine. Ceci avait été compris sur le plan
économique et douanier. Les entreprises américaines
travaillant en Chine étaient invitées à
revenir, même si elles affrontaient des coûts
de production supérieurs. De même, les tarifs
douaniers sur les importations de produits chinois seraient
considérablement relevés. Remarquons que la
Chine avait menacé de prendre des mesures de rétorsion
sur les produits américains, mais ce n'est pas de
ce problème que nous discutons ici.
Plus grave cependant, Trump avait laissé
entendre que ses « amis » dans le complexe militaro-industriel
américain lui conseillaient de ne pas craindre d'affrontements
militaires avec la Chine en mer de Chine méridionale.
Ils ne semblaient pas craindre que ceux-ci puissent dégénérer
avec l'emploi par les deux parties d'armes nucléaires
dites tactiques. Cependant, ce fut face à ce risque
que les démonstrations aéro-navales américaines
dans le Pacifique sont restées relativement prudentes.
Obama avait semble-t-il empêché l'irresponsable
Hillary Clinton de faire franchir certaines limites.
Pourtant tout le monde a noté que,
concernant l'arme nucléaire stratégique, utilisant
des missiles intercontinentaux, Donald Trump a récemment
appelé à un renforcement du potentiel américain,
pourtant déjà capable de détruire plusieurs
fois la planète. Comme ses futures bonnes relations
avec Vladimir Poutine ne supposeraient pas un recours à
l'arme nucléaire, c'était manifestement la
Chine qui était visée.
Or face à la Chine, sur le plan militaire,
le complexe militaro-industriel américain, comme
Trump lui-même, aurait le plus grand intérêt
à se méfier. Certes, la Chine ne dispose encore
que d'un seul porte avion, le Liaoning , entré en
service en 2012. Mais elle a bien d'autres atouts, capable
de faire jeu égal avec l'Amérique sur mer
et dans les airs.
Aviation et missiles
chinois
L'armée chinoise a beaucoup investi,
de concert avec Moscou, dans le domaine des missiles à
forte pouvoir de pénétration, capables d'être
utilisés non seulement contre les alliés de
Washington en Mer de Chine, mais contre des objectifs situés
aux Etats-Unis dans un certaine profondeur en arrière
des côtes. Nous l'avons déjà mentionné.
Mais nous voulons ici attirer l'attention
sur les investissements considérables réalisés
actuellement par la Chine dans le domaine des avions de
combat. Ceux-ci ne seront initialement pas aussi nombreux
que leurs homologues américains, mais ils seront
bien plus offensifs qu'eux. Rappelons que l'Amérique
ne dispose toujours pas de l'avion de 5e génération
F 35, malgré le $1.45 trillion au moins consentis
au bénéfice de son constructeur Lockheed Martin
Aeronautics.
Concernant les nouvelles séries d'appareils
chinois, bornons-nous ici à les énumérer
rapidement. Leurs constructeurs sont assez discrets à
ce sujet, mais le lecteur intéressé trouvera
dans l'incontournable Wikipedia un certain nombre de précisons.
Le
projet en cours le plus complexe est concurrent du programme
F35. Il s'agit du Chengdu J-20 de 5e génération
et multi-rôles dont le premier exemplaire en état
opérationnel a été livré à
la People's Liberation Army Air Force en 2016. Il sera opérationnel
avant les homologues développés en coopération
par l'industrie russe.(voir image).
Dans les prochains mois, en conséquence,
un programme analogue concernant la fabrication d'un chasseur
de 4e génération le J-31, aux performances
moindres sera ralenti. Pour le moment le Chengdu J-10 plus
léger continuera à être produit en grandes
séries. Il équipe l'aviation chinoise. Il
en est de même du Shenyang J-11D jet fighter entrant
actuellement dans la phase de production massive.
Concernant les avions de transport militaires,
essentiels à toute opération supposant des
projections de force, la Chine annonce la prochaine mise
en service du transporteur lourd [Xian] Y-20 et du transporteur
moyen [Shaanxi] Y-9. Elle sera avec les Etats-Unis et la
Russie le seul pays capable aujourd'hui de construire efficacement
ce type d'appareil. Comme on le sait l'Union européenne
a pris beaucoup de retard en ce domaine.
Dans le domaine naval la Chine continuera
à produire des destroyers de type 052D porteurs de
missiles guidés. L'ambition est de disposer rapidement
de 14 d'entre eux. Par ailleurs 2 porte-avions lourds seront
construits, en complément de l'actuel Liaoning cité
plus haut. Enfin, concernant les missiles ICBM porteurs
de charges nucléaires, de nouvelles générations
seront développées, notamment le Dongfeng-41
(DF-41) à combustible solide.
Par ailleurs l'équipement en missiles
capables d'être lancés par des sous-marins
se poursuivra. On notera notamment le projet 09-IV? concernant
des missiles balistiques à propulsion nucléaire.
Rappelons enfin que toutes les armées du monde ont
noté les performances des nombreux systèmes
électroniques de détection avancée
et de riposte dont s'est dotée l'armée chinoise,
en coopération avec les Russes.
Tout ceci devrait obliger Donald Trump à
une certaine prudence. D'autant plus qu'il ne pourra pas
compter, pensons-nous, sur une coopération russe,
tant militaire qu'industrielle. Moscou s'appuiera peut-être
sur ses futures relations avec Trump pour contrebalancer
le poids politique de Pékin au sein de l'Eurasie,
mais ceci jusqu'à un certain point seulement.