Série
Trump
Budget. Où Donald Trump trouvera-t-il l'argent?
Jean-Paul Baquiast 10/11/2016
Le programme électoral
présenté par Donald Trump comporte un certain
nombre de projets de dépenses publiques qui ont certainement
contribué à son succès auprès
d'un électorat issu des classes moyennes excédées
de voir le libéralisme et la spéculation financière
paralyser les possibilités d'intervention publique
- ceci tant au plan fédéral qu'à celui
des Etats fédérés.
L'accent a été
mis notamment sur l'engagement d'un programme de grands
travaux dans le domaine des infrastructures, dont tout le
monde avait pu constater que faute d'investissements, certaines
étaient devenus proches de celles d'un pays sous-développé.
Mais le coût estimé en sera important, soit
estimation sur 10 ans 1 000 Md USD soit 100 Md USD annuels.
Une partie devrait être réalisée dans
le cadre de "partenariats publics-privés"
Encore faudra-t-il que le privé s"y intéresse.
Il faudra ajouter la construction d'un mur à la frontière
mexicaine, qui ne sera pas directement productif et qui
nécessitera d'importantes dépenses.
Parallèlement, en termes de recettes,
Donald Trump promet une réduction massive des impôts
sur le revenu et sur les sociétés. Soit une
diminution de l'impôt sur le revenu (33% contre 39,5%
pour la dernière tranche) et une réduction
des tranches (de 7 à 3 tranches). Concernant l'impôt
sur les sociétés, il promet une baisse de
35% à 15% ainsi que diminuer la taxe de rapatriement
sur les bénéfices réalisés à
l'étranger.
Ces baisses seraient compensées par
de nouvelles taxes douanières: 45% sur les produits
chinois, 35% sur les biens mexicains et 10% pour le reste
du monde. Encore faudrait-il que les Américains continuent
à importer des produits en provenance de ces pays,
alors que Donald Trump envisage de relocaliser de nouvelles
industries. Le coût pour l'Etat de ces relocalisations
n'a d'ailleurs à notre connaissance pas été
estimé. Tout ne pourra pas être supporté
par les entreprises concernées.
Globalement Donald Trump estime le coût
de son programme à 4.400 milliards sur 10 ans. Mais
il espère que la baisse massive des impôts
provoquera un boom de la croissance et en conséquence
un afflux de recettes fiscales supplémentaires de
1.800 milliards de dollars. Ceci, qui n'est en rien garanti,
représente encore une augmentation de 2.600 milliards
de dollars de la dette publique sur dix ans. Pour information,
la dette publique américaine était en 2013
de 17 559 Md USD ou 104,5 % du PIB.. On peut la comparer
à celle de la France soit à la même
date 1 935 Md USD ou 93,9 % du PIB 10 ans.
De nouvelles recettes, ou plus exactement
de nouvelles économies budgétaires, pourront
provenir dans les prochaines années d'une diminution
du budget militaire, lequel est estimé pour 2015
à 590 MdUSD annuels. Une normalisation des relations
avec la Russie pourrait la justifier, comme de moindres
interventions militaires en mer de Chine et ailleurs. Mais
il faudrait réussir à convaincre deux lobbies
très forts, celui des responsables de ces actions
au Pentagone et celui du complexe militaro-industriel qui
vit essentiellement de dépenses d'armement. Par ailleurs,
une part importantes des dépenses relève de
l'entretien d'environ 200 bases militaires dans le monde.
On voit mal comment faire accepter au Pentagone la fermeture
rapide de certaines d'entre elles et la reconversion du
personnel militaire qui y est affecté.
Donald Trump pourra-t-il compter, pour couvrir
une partie des coûts de son programme, sur des prêts
de la Banque fédérale de réserve, se
traduisant par l'émission de Bons du Trésor
fédéraux, que divers investisseurs américains
ou étrangers pourraient accepter d'acheter (en attendant
un remboursement accompagné du paiement d'intérêts)?
C'est par des mesures de cette sorte que le Trésor
américain a pu ces dernières années
couvrir un nombre important de dépenses non rentables,
notamment dans le domaine militaire. Ceci n'aurait rien
d'impossible.
Encore faudrait-il que la conjoncture politique interne
et internationale soit suffisamment favorable pour convaincre
des investisseurs, dont une grande partie provenait de Chine,
de continuer à acheter des US Bonds. Rappelons que
la Chine, dans le cadre du BRICS, met en place diverses
mesures visant à rendre le dollar moins attractif
en attendant de le remplacer par une autre unité
monétaire. Ceci dit, elle est loin d'avoir parti
gagné. Le dollar conserve beaucoup d'atouts.
Ne tirons pas ici de conclusion concernant
la façon dont Donald Trump pourra faire face à
ses engagements, si dans l'intervalle il ne les abandonne
pas. Disons seulement que les majorités républicaines
au Congrès, principalement émanant d'électeurs
vivant plus de bénéfices boursiers que de
retours sur investissements publics, devront accepter de
le soutenir
Références
- Budget fédéral pour l'année
fiscale 2012 : budget voté 3 796 milliards Md USD
, recettes de 2 469 USD déficit 1 327 MdUSD.
- Dette publique 2013 17 559 Md USD ou 104,5 % du PIB. pour
info France 1 935 Md USD ou 93,9 % du PIB 10 ans