Politiques
industrielles. Rachat de Monsanto par Bayer. Ils ne se cachent
même plus
Jean-Paul Baquiast 17/09/2016
L'on vient d'apprendre cette semaine que Monsanto a accepté
son rachat par Bayer pour la somme de $66 milliards. Différentes
instances en charge de la défense de la concurrence,
aux Etats-Unis et en Europe, doivent encore approuver définitivement
l'opération. Mais elle ne sera pas remise en cause.
La nouvelle société contrôlera 25% de
la production mondiale de semences et de pesticides. Bayer
est la seconde firme mondiale après la suisse Syngenta
pour les industries pharmaceutiques. Elle réalise
17% du marché des produits agrochimiques. Quand à
Monsanto, bien connue pour sa production de semences OGM,
elle est la première mondiale. Elle détient
25% du marché des semences. Syngenta, quant à
elle, a décidé de s'unir avec le chinois ChemChina.
Le marché mondial précédemment détenu
par six géants, Syngenta, Bayer, BASF, Dow, Monsanto
et DuPont le sera désormais par trois seulement.
Ne mentionnons pas ici les sommes considérables reçues
par les dirigeants des deux entreprises à l'occasion
du rachat.
Comme prévu, différentes organisations
représentant les producteurs agricoles se sont élevées
contre l'opération. Ce fut le cas de l'US National
Farmers Union qui en a appelé au Congrès.
On a cependant moins entendu en Europe la FNSEA et son homologue
allemand. Néanmoins, elles se disent « préoccupées
».
Ces organisations professionnelles veulent
maintenir une certaine concurrence se traduisant sur les
prix. Elles affirment par ailleurs rechercher une relative
diversification dans les solutions. Ce ne sera évidemment
pas le cas du nouveau conglomérat qui inondera le
marché de mono-produits, tant en semences qu'en pesticides,
en recherchant non leur moindre dangerosité mais
les plus grands profits rapportés. Les monopoles
une fois acquis, rien ne les empêchera d'augmenter
leurs prix.
Du côté des organisations dites
écologistes se disant protectrices de la diversité
des espèces et de la santé des consommateurs,
il faut tendre une oreille attentive pour entendre leurs
éventuelles protestations. Quant aux gouvernements
ou aux régulateurs européens, ils semblent
muets.
Manifestement, ce silence complice était
attendu par les responsables de Bayer et Monsanto.. Sans
cela, ils auraient pris quelques précautions dans
l'annonce de la fusion, présentée au contraire
par eux comme un grand succès.
Pourtant l'argument selon lequel face à
l'augmentation de la population et la diminution des terres
productives, l'usage à grande échelle des
produits agrochimiques s'imposera, ne tient pas. Les défenseurs
d'une production agricole répartie et diversifiée
peuvent faire valoir différentes expériences
justifiant le bien fondé de ce véritable choix
de civilisation. Mais nul ne les entendra.