Note
stratégique 2
Assassinat du prêtre Jacques Hamel
Guerre contre le terrorisme? Oui mais quelle guerre?
Jean-Paul Baquiast, Christophe Jacquemin 26/07/2016
Certains lecteurs penseront peut-être
que cet article s'éloigne trop de la charte éditoriale
de notre site, consacré en principe aux sciences
et technologies. Nous pensons que ce n'est pas le cas. L'article
pose à la science politique un problème qu'elle
parait aujourd'hui incapable de résoudre. Automates
intelligents
Dans
un article du 19/07, publié sur un autre site 1),
nous écrivions que la « généreuse
politique d'accueil aux migrants » de Angela Merkel
favorisait nécessairement en Allemagne l'entrée
de fanatiques islamistes, souvent jeunes, conditionnés
pour conduire des attentats terroristes . Depuis celui de
Munich visé par cet article, deux autres attentats
se sont produits en Allemagne, frappant, selon la grande
presse, la population de stupeur.
Mais
l'on savait que la France, déjà atteinte par
des attentats beaucoup plus meurtriers, restait une cible
pour les organisations djihadistes, la plus active se présentant
aujourd'hui sous le nom de Daesh. L'attentat de ce matin
dans l'église de Saint Etienne du Rouvray a pleinement
justifié ces prévisions. Un prêtre de
86 ans, le père Jacques Hamel, a été
sauvagement égorgé au couteau, une autre personne
grièvement blessée, lors de la messe de 9h30.
L'attentat a été immédiatement revendiqué
par Daesh.
Nous sommes résolument athés ici, et l'assassinat
d'un prètre ne nous parait pas plus grave que celle
de tout autre cible de Daesh. Néanmoins l'assassinat
et ses circonstances ont particulièrement révoltants
en l'espèce. Les tueurs voulaient-ils s'en prendre
particulièrement et publiquement à l'Eglise
catholique? Le calcul vise-t-il à dresser contre
l'islam la communauté catholique mondiale qui demeure
une force considérable, en vue de provoquer des guerres
civiles généralisées. Quoiqu'il en
soit, devant ce meurtre, nous nous sentons nous-mêmes
viscéralement catholiques
Aucun des deux assassins, selon les informations
données par la police, n'était des réfugiés.
Le tueur « présumé » selon une
formule bien indulgente imposée par la loi, habitait
depuis plusieurs années dans la commune. Agé
de seulement 19 ans, il avait déjà tenté
à deux reprises de se rendre en Syrie : une première
fois en mars 2015, puis une seconde fois trois mois plus
tard, en mai 2015, alors qu'il était mis en examen
et placé sous contrôle judiciaire dans le cadre
de sa première tentative de départ avortée.
Son contrôle judiciaire violé
avait donc été révoqué, et il
a été incarcéré le 22 mai 2015.
Après dix mois de prison, il a de nouveau été
placé sous contrôle judiciaire, avec assignation
à résidence sous surveillance électronique,
le 18 mars 2016, et interdiction de quitter le département.
L'attaque contre l'église s'est déroulée
durant les heures où sa sortie était autorisée,
entre 8 h 30 et 12 h 30 du lundi au vendredi.
Tout ceci signifie que des tueurs potentiels
autochtones, musulmans ou non, se font recruter, soit dans
le cadre d'une mosquée fondamentaliste salafiste,
comme l'était précédemment avant fermeture
(?) celle de la ville de Saint Etienne du Rouvray, soit
par relation, soit par les réseaux sociaux. Certains
sont issus de familles se disant chrétiennes. Il
ne serait pas impossible à la police de les détecter
avant leur passage à l'acte, en multipliant les actions
de renseignement.
Mais celles-ci, à conduire principalement
au sein d'une population musulmane de plus de 8 millions
de personnes, supposeraient des dizaines de milliers de
fonctionnaires. Leur action serait de plus en plus rejetée
par cette population. Les individus une fois condamnés
et remis en liberté pourraient être plus facilement
suivis, mais là encore les effectifs actuels en seraient
incapables. Quant au bracelet électronique, l'on
savait depuis longtemps qu'il n'empêchait pas les
passages à l'acte les plus dangereux.
Un Guantanamo à
la française ?
L'opposition réclame non sans raison
des actions bien plus radicales. On a parlé d'un
Guantanamo à la française où seraient
incarcérés pour des durées indéterminées
les individus déjà coupables d'association
avec des terroristes, ou dans l'immédiat ceux revenant
de Syrie et d'Irak, tueurs expérimentés prêts
à l'action. Ceci éviterait en partie par ailleurs
la contamination dans les prisons de détenus initialement
non tentés par le terrorisme. Le coût de tels
centres de détention serait évidemment important,
mais l'argument ne suffit pas pour s'y refuser. Nous pensons
que l'idée devrait être étudiée
voire mise en oeuvre, mais dans une configuration toute
différente.
Les défenseurs de l'état de
droit font valoir que ces centres obligeraient à
remettre en cause toutes les traditions judiciaires tant
française qu'européennes. Par ailleurs ils
affirment que le Guantanamo américain ne semble pas
avoir beaucoup servi dans le combat contre le terrorisme
sur le sol américain. Sans doute, mais que ce serait-il
passé si des milliers de militants d'Al Qaida avaient
été laissés libres de circuler. En
fait, les méthodes les plus efficaces seraient celles
apparemment utilisées par les Russes dans la lutte
contre le terrorisme tchétchène. Inutile de
les décrire ici, mais là encore combien de
dégâts collatéraux et de perversions
possibles pourraient en résulter, dans un pays comme
la France qui n'avait plus connu de telles méthodes
depuis l'Occupation.
Nul en France ne propose aujourd'hui de
solutions qui paraissent efficaces pour lutter contre les
opérations menées par Daesh. Leur but est
évidemment de dresser contre les musulmans français
tous les autres segments de la population, afin de généraliser
de véritables situations de guerre civile. Tous les
responsables raisonnables s'en rendent compte, y compris
dans les communautés musulmanes. Mais que faire?
Faut-il faire, au moins momentanément, un aveu d'impuissance
qui encouragerait Daesh à augmenter ses attaques?
En fait, l'histoire a montré que
face à des situations hostiles il n'y avait pas d'impuissance
qui ne puisse être surmontée. Ce sera à
tous les responsables français, comme d'ailleurs
à tous citoyens ne voulant pas rester inactifs, de
proposer et expérimenter dans les mois qui viennent
des solutions nouvelles possibles. Celles-ci alors, mobilisant
tout un peuple, pourraient surprendre par leur efficacité.
Ajoutons que les méthodes de contrôle
strict, appliquées en Israël, non sans failles,
ne semblent pas utilisables dans un grand Etat comme la
France
1) Voir
Bavière.
La généreuse politique d'accueil aux réfugiés.