Editorial 1.
Panama Papers. Réflexion rapide
Jean-Paul
Baquiast, Christophe Jacquemin, 04/04/2016
Les
Etats sont par la voie des impôts qu'ils prélèvent
et de leurs administrations fiscales chargées de
ce prélèvement, les seuls structures permettant
d'identifier les activités de tous ceux qui produisent
et consomment les ressources du monde. Dans un monde mis
en danger aujourd'hui par la disparition des ressources
naturelles et l'inégalité croissante entre
les 5% les plus riches et les autres, cette information
est capitale pour permettre aux quelques organisations qui
s'en préoccupent d'identifier globalement les acteurs
de ces deux menaces. Il s'agit d'une démarche de
« transparence » indispensable à
la démocratie revendiquée aujourd'hui par
un nombre croissant de citoyens.
Certes
les Etats et dans une moindre mesure leurs administrations
fiscales, ne sont pas exempts de reproches, qu'il s'agisse
de leurs choix politiques ou du manque fréquent de
transparence dans l'exercice de leurs responsabilités.
Il faut bien se rendre compte cependant que, sans ces structures,
tardivement apparues dans l'histoire du monde, les citoyens
ne sauraient rien de la façon dont ce monde évolue.
Ils seraient rejetés dans une ignorance presque aussi
complète que celle ayant empêché les
premiers homo sapiens de comprendre où leur propre
évolution les conduisait. Ce ne serait pas les 5%
de dominants qui les informeraient.
De plus,
en démocratie, c'est-à-dire dans des pays
où un nombre croissant de citoyens demandent la mise
en place d'investissements publics bénéficiaires
à tous et visant un intérêt général
de long terme transcendant les intérêts particuliers,
les Etats et les administrations fiscales sont les seuls
capables de prélever sur les activités de
tous, production et consommation, les ressources permettant
par les impôts de financer ces investissements. Là
encore, en leur absence, le monde ne serait que le produit
d'une concurrence darwinienne entre activités égoïstes,
souvent prédatrices, ne visant ni le long terme ni
l'intérêt général.
Vu leur
importance stratégique, les Etats et leurs administrations
fiscales sont nécessairement l'objet de toutes les
attaques des puissants, soit de l'intérieur par le
détournement politique et la corruption, soit de
l'extérieur. Dans ce dernier cas, il s'agit essentiellement
de fuir par tous moyens possible les processus de déclaration
imposés par les administrations fiscales afin d'identifier
pour les taxer les grands acteurs de la production et de
la consommation.
Cette
fuite, inutile de le préciser ici, est rendue possible
par la non-coopération entre Etats et administrations
nationales, résultant du fait qu'aucune entente entre
Etats n'a pu encore se mettre en place en vue d'une action
commune. Néanmoins, Etats et administrations ont
aujourd'hui convenu de s'accorder sur un minimum de collaboration
afin d'éviter une fuite généralisé
des éventuels contribuables.
Prolifération
de Paradis fiscaux
Cette
collaboration n'est cependant jamais allé jusqu'à
bannir l'existence au sein de tel ou tel Etat de « paradis
fiscaux », c'est-à-dire de territoires
ou d'organisations ayant décidé de s'affranchir
de toutes les règles dont les Etats ont convenu pour
identifier les activités et les personnes assujettissables
aux impôts. Nicolas Sarkozy s'était permis
il y a quelques années d'affirmer: « Les
paradis fiscaux, c'est fini ». Ils se sont borné
sà se déplacer ailleurs, en prenant de plus
en plus d'ampleur.
Un point
essentiel à considérer tient au fait que les
activités non déclarées ne concernant
pas seulement celles dont les auteurs veulent échapper
aux fiscs. Elles concernent aussi, et sans doute de plus
en plus, des activités criminelles. Les responsables
de celles-ci veulent échapper prioritairement aux
polices et aux justices des Etats qui ont décidé
de lutter contre elles. L'anonymat permis par les paradis
fiscaux leur est précieux. Il leur permet non seulement
d'effectuer entre eux diverses transactions de grande ampleur
mais de recycler dans l'économie ouverte (blanchir),
l'essentiel de leurs bénéfices afin qu'ils
puissent en profiter en toute impunité.
Se
méfier des campagnes de désinformation
Nous
pouvons conclure de ce propos que, dans un temps où
sous l'influence des politiques dites libérales mondialisées,
les Etats et plus particulièrement les administrations
fiscales sont accusés de paralyser les initiatives
de croissance, il faut au contraire tout faire pour permettre
le bon fonctionnement de ces institutions publiques. Il
faut défendre de toute attaque les services qui en
sont chargés et garantir leur bon fonctionnement
.
Parallèlement,
il faut saluer et encourager les représentants de
la presse qui étudient et font connaître les
divulgations. Certes, certains ne sont pas indépendants
de diverses influences politiques. Cependant la diversité
de leurs origines et la haute idée qu'ils se font
manifestement de leur mission d'enquête et d'information
montre clairement que l'existence au niveau mondial de ce
que l'on nomme une presse libre est indispensable au fonctionnement
démocratique du monde. Bien évidemment, il
faut inclure dans cette presse libre tous ceux qui utilisent
internet sans y dissimuler leur identité.
De même,
comme certains gouvernements commencent à s'en apercevoir,
il faut encourager et récompenser ceux que l'on nomme
désormais les lanceurs d'alerte. Il n'est pas utile
de trop s'interroger sur les motifs qui les poussent à
agir, il faut seulement considérer la valeur des
révélations qu'ils font.
Ce qui n'empêche évidemment
pas de recevoir celles-ci avec circonspection. Dans ces
domaines les opérations de désinformation
abondent. Dans le cas des Panama Papers, il est par exemple
curieux de voir qu'aucun américain n'y figure alors
qu'un bruit disproportionné est donné au fait
que des « amis » de Poutine soient
mis en cause...Poutine lui-même n'étant en
aucun cas compromis.
Ainsi, concernant l'ICIJ (International
Consortium of Investigative Journalists) , le consortium
ayant mené l'enquète, certains font valoir
que parmi ses récents membres, l'on trouve: Adessium
Foundation, Open Society Foundations, The Sigrid Rausing
Trust, the Fritt Ord Foundation, the Pulitzer Center on
Crisis Reporting, The Ford Foundation, The David and Lucile
Packard Foundation, Pew Charitable Trusts and Waterloo Foundation.
Or l'Open Society Foundations (OSF) est un réseau
de fondations créé en 1991 par le milliardaire
américain George Soros. Les objectifs de ce réseau
sont de promouvoir « la gouvernance démocratique,
les droits de l'homme et des réformes économiques,
sociales et légales » Quant on connait
les liens de George Soros avec la CIA, sans mentionner tout
ce qu'il y a de corrompu sur la planète, on peut
s'interroger sur les prétendues intentions de lutte
pour la transparence de l'opération ICJI, notamment
sur la mise en cause répétée à
grands échos de Vladimir Poutine, mise en cause qu'apparemment
rien ne justifie.
Ajoutons
que, à propos de l'absence de fraudeurs américains
dans les Panama Papers, certains experts précisent
que les riches américains n'ont aucun besoin de se
réfugier au Panama. Ils ont tout ce qu'il faut à
la maison. Voir WSWS Shima Baradaran
Baughman, a law Professor University of Utah, College of
Law, told Fusion, Americans can form shell companies
right in Wyoming, Delaware or Nevada. They have no need
to go to Panama to form a shell company to use for illicit
activities.
Post scriptum
Dans la suite de cet éditorial le
lecteur pourra lire un article que nous avons publié
le 06/04 sur un autre site
* Inscrire les Etats-Unis en tête de la liste des
paradis fiscaux http://www.europesolidaire.eu/article.php?article_id=2115&r_id=
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