Automates
Intelligents s'enrichit du logiciel
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Article.
Boston Dynamics et Google. Le gagnant rafle tout
Thierry Berthier 28/02/2016
Cet
article de Thierry Berthier, qui est membre de notre comité
de rédaction, a été publié simultanément
sur les sites EchoRadar
; Contrepoints
;
La
synthèse On Line. L'auteur, que nous remercions,
a accepté que nous le reprenions ici en intégralité.
L'experience nous a montré que beaucoup de lecteurs,
faute de temps, n'ouvrent pas les liens qui leur sont fournis.
Ils se limitent généralement aux textes.
L'article illustre de façon très explicite
la thèse à laquelle nous souscrivons, selon
laquelle le "complexe Google" est en train de
devenir le premier des "maîtres du monde".
Concernant Google, il n'est pas inutile de rappeler qu'il
n'est pas seul à la conquête du monde. Son
petit frère Facebook n'est pas en reste. Tous les
deux d'ailleurs coopèrent avec la NSA, la DIA le
DOD et la Darpa. Voir
l'article
Automates
Intelligents.
La
robotique civile et militaire connaît un développement
sans précédent. Sans réelle surprise,
Google se positionne aujourdhui en leader. Son avance
technologique est telle quil va devenir difficile,
voire impossible, de défier Google sur la même
table de jeu
1
Loi de puissance et Extrêmistan
Le principe
du «gagnant rafle tout» accompagne les lois
de puissance qui interviennent en économie, en finance
et dans lensemble des processus de création
artistique, littéraire ou scientifique. Dès
que lactivité humaine opère sur un contexte
de concurrence scalable, la loi de puissance agit en déterminant
un domaine du « tout ou rien » dans lequel un
seul gagnant rafle toute la mise alors que la grande majorité
des autres joueurs nobtient rien. Le philosophe de
laléatoire et ancien trader Nassim Nicholas
Taleb a donné le nom dExtrêmistan à
ce domaine du scalable, du hasard sauvage et des cygnes
noirs qui font et défont les empires, les organisations,
les structures et les carrières personnelles.
Selon
NN. Taleb, lExtrêmistan coexiste avec le Médiocristan,
le territoire du hasard modéré dans lequel
les gagnants sont plus nombreux mais ne remportent quune
toute petite partie du gâteau (les gains possibles
sont fortement limités). Le Médiocristan est
peu sensible aux cygnes noirs de Taleb et saccommode
assez bien des prévisions issues de la distribution
gaussienne. Taleb laisse entendre que le Médiocristan
correspond au contexte dans lequel nos ancêtres évoluaient
mais quaujourdhui, nous baignons dans un Extrêmistan
de telle intensité que la courbe en cloche (la gaussienne)
serait devenue, selon lui, dangereuse et nocive lorsquelle
est utilisée pour réaliser des prévisions.
Dans plusieurs de ses ouvrages, NN Taleb revient sur les
processus de création humaine et sur leur rare transformation
en succes story. Ses réflexions sappliquent
autant à la naissance dun tube chez une chanteuse
débutante quà lémergence
dune innovation technologique de rupture qui va transformer
le monde. Le concept dExtrêmistan sapplique
assez bien à la montée en puissance de la
robotique et de lintelligence artificielle et aux
rares acteurs/joueurs qui vont rafler la mise.
2
Le cas de la robotique comme domaine de lExtrêmistan
La robotique
(civile et militaire) connaît aujourdhui une
phase de développement sans précédent.
Les sociétés leader du domaine comme Boston
Dynamics, propriété de Google, contribuent
à cette montée en puissance. La dernière
vidéo du robot humanoïde Atlas, mise en ligne
par Boston Dynamics le 23 février 2016, est à
ce titre édifiante. Elle totalise près de
dix millions de vues sur Youtube en moins de trois jours.
On y voit un robot capable douvrir une porte et de
se déplacer en autonomie sur un terrain irrégulier
en forêt, enneigé et glissant, tout en maintenant
son équilibre et son allure.
Dans
la seconde partie de la vidéo, Atlas range des cartons
sur une étagère puis subit un test de «stress»
au cours duquel un opérateur perturbe volontairement
sa mission (celle de ramasser un carton). On constate que
le robot, même perturbé, maintient ses fonctionnalités
et se montre persévérant jusquà
la réalisation de son action. Pour finir, lopérateur
fait chuter Atlas mais celui-ci se relève rapidement
et redevient opérationnel. Derrière ces images,
le message de Boston Dynamics est particulièrement
clair : «Mes machines sont résilientes. Elles
savent encaisser des perturbations et des stress sans perdre
leurs capacités opérationnelles».
La publication
régulière de vidéos dévoilant
les performances dynamiques de la gamme de robots (BigDog,
Atlas, Petman, Cheetah, Ls3, SandFlea, RHex, RiSE et LittleDog)
permet daffirmer et de référencer mondialement
lexpertise et la suprématie de Boston Dynamics
dans son domaine. On notera que la totalité de cette
gamme de robots est immédiatement déclinable
en version militaire. Rien ne dit dailleurs quil
nexiste pas une seconde gamme de machines échappant
aux campagnes de communication de Boston Dynamics pour des
raisons de confidentialité et de classification
La partie
visible de lédifice technologique demeure à
ce jour suffisante pour que Boston Dynamics se positionne
en leader mondial. En toute logique, Il faudrait pouvoir
visionner lensemble des tests réalisés
pour chaque mission afin de mesurer avec précision
le taux de réussite fonctionnelle du robot sur une
tâche fixée Ces données ne sont
pas fournies par le constructeur au grand public. Elles
sont logiquement réservées aux futurs acheteurs.
Cette petite incertitude ne doit pas pour autant occulter
la réalité des succès technologiques
de la filiale de Google.
Les Challenges de robotique organisés chaque année
par la DARPA (lAgence américaine pour les projets
de recherche avancée de défense) démontrent
et renforcent la position dominante de Boston Dynamics sur
le marché mondial des robots humanoïdes. Cette
pôle-position sapparente même à
une suprématie absolue lorsque que lon restreint
le classement au sous-domaine du déplacement résilient
dune machine civile en terrain irrégulier.
Atlas semble ainsi relever (presque) tous les défis
du dernier Challenge-Darpa, contrairement à ses cousins
issus de la concurrence
Cette avance technologique risque bien de ne plus être
rattrapable aujourdhui par une société
qui débuterait et souhaiterait sengager sur
le marché. Il est en effet difficile dimaginer
une startup agile et innovante capable de produire un niveau
équivalent defficacité dynamique et
de résilience (sauf à disposer des plans précis
et des algorithmes qui animent le robot). Les recherches
en amont dAtlas ont été longues et coûteuses.
Elles ont mobilisé les meilleurs ingénieurs
et les meilleurs chercheurs mondiaux du domaine. La tutelle
de Google a également assuré la pérennité
de léquipe de R&D qui développe
la collection « Boston Robotics ». Bref, le
marché de la robotique humanoïde répond
aux critères de la loi de puissance, du principe
du gagnant qui rafle toute la mise, pour longtemps et des
règles qui régissent lExtrêmistan
cher à NN Taleb.
Les
suprématies convergentes de Google
En supposant
que Google ne subisse pas à court terme de partition
ou de découpage imposé par les autorités
américaines, on peut facilement imaginer que ses
différents domaines dexcellence et de suprématie
technologique se superposent pour converger vers une gamme
de robots dotés des propriétés mécaniques
et dynamiques issues de Boston Dynamics et dune IA
créée dans les laboratoires de DeepMind-Google.
Ces derniers enchaînent actuellement les performances
algorithmiques fondées sur les réseaux de
neurones et sur des techniques dapprentissage profond
non supervisé particulièrement efficaces.
Atlas
2.0. pourrait alors combiner « la tête et les
jambes » en exploitant deux suprématies technologiques
complémentaires propriétés de Google.
Laccélération en terme dinnovation
et lavance sur les constructeurs concurrents sen
trouverait encore renforcée, illustrant à
nouveau les lois de lExtrêmistan.
Cette
suprématie technologique mérite également
une analyse stratégique. La robotisation des systèmes
darmes est une réalité qui va bouleverser
lensemble des doctrines militaires et lart de
la guerre en général. Le champ de bataille
(qui est lui aussi régi par les lois de puissance)
va voir déferler des unités dAtlas armés,
résilients, déterminés, combatifs et
bien plus belliqueux que leur cousin manutentionnaire de
carton présent dans la vidéo. Lavance
technologique se traduira immédiatement par une avance
opérationnelle sur le terrain procurant un avantage
tactique et stratégique sur lennemi. Bref,
cest aussi sous le feu que le gagnant raflera toute
la mise