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Des
trous noirs aux trous blancs
Jean-Paul
Baquiast 08/01/2016

Image:
NewScientist
Un
article de Stuart Clarck, « Quantum Bounce »
publié par le NewScientist du 2 janvier 2016, p. 32,
présente des hypothèses nouvelles concernant
les trous noirs et leur devenir. Nos lecteurs s'intéresseront
particulièrement à ces hypothèses, car
deux cosmologistes qu'ils connaissent bien notamment par leurs
interventions sur ce site, y jouent un rôle très
important. Il s'agit de Carlo Rovelli, de la faculté
d'Aix Marseille, et de Aurélien Barrau, de la faculté
de Grenoble.
En
simplifiant la question, nous pouvons dire que leurs travaux,
menés conjointement avec ceux d'autres théoriciens
tel Hal Haggard du Bard College à New York, posent
la question de savoir si en conjuguant théorie de la
relativité générale et physique quantique,
il ne serait pas possible d'éclairer la nature et le
devenir des trous noirs. Ceux-ci, dont l'existence n'est plus
discutée, posent une question insoluble dans la cadre
de la relativité générale: que deviennent-ils
lorsque après avoir capturé un nombre immense
de particules, leur densité et la force gravitationnelle
qui y règne deviennent telles que les lois de la physique,
s'appliquant à notre univers, cessent de pouvoir s'exercer
dans leur cas? .Les théoriciens avaient nommé
l'état atteint par eux une Singularité, terme
qui n'a aucun intérêt en pratique puisqu'il décourage
toute recherche ultérieure à ce sujet. Autant
parler de mystère divin.
Le
concept de Singularité présente cependant un
intérêt, puisqu'il est utilisé pour désigner
l'état préexistant au Big Bang, état
dont serait issu notre univers. Mais il n'éclaire pas
plus les questions relatives à l'origine du Bang Bang
que celles relatives à l'origine ou au destin final
des trous noirs. Dans les hypothèses dites des univers
successifs, il est possible de supposer qu'un univers précédant
le Big Bang aurait pu à la fin de sa vie se concentrer
au point de former un état extrêmement dense
(big crunch) dont aurait pu surgir notre propre univers. C'est
l'hypothèse du rebond. Dans cette perspective, on peut
imaginer que tous les trous noirs observés par nous
pourraient à la fin de leur évolution donner
naissance par rebond à des bébés-univers,
participant d'un multivers que nous n'aurions en principe
aucune possibilité d'observer. Encore faudrait-il préciser
le mécanisme générateur.
La gravitation quantique à
boucle
L'originalité
de l'hypothèse formulée par Carlo Rovelli et
ses collègues est qu'elle tente une synthèse
entre ces deux grands domaines de la physique encore inconciliables,
la physique einsténienne et la physique quantique.
Carlo Rovelli, un moment associé avec le cosmologiste
américain Lee Smolin également souvent cité
sur ce site, a imaginé une synthèse entre gravitation
et mécanique quantique qu'il a nommé gravitation
quantique à boucles. Celle-ci, bien plus qu'un autre
type de gravitation quantique dite Théorie des Cordes,
pourrait résoudre, y compris un jour expérimentalement,
la question de savoir ce qu'il advient du temps et de l'espace
einsténiens quand ils atteignent des niveaux extrêmes
de concentration. Dans l'hypothèse de la gravitation
quantique à boucles, l'espace-temps serait fait de
boucles très petites et enchevêtrées.
Celles-ci n'apparaissent pas à un observateur éloigné,
mais elles constituent des quanta d'un espace-temps ultime,
ne pouvant pas être divisées davantage afin de
former des éléments encore plus petits. Elles
obéissent alors aux lois de la physique quantique.
Carlo
Rovelli et Hal Haggard ont étendu en 2014 cette hypothèse
à ce qui pourrait se passer à l'intérieur
d'un trou noir parvenu à des degrés ultimes
de concentration. Au lieu de disparaitre de notre monde physique
sous la forme d'une Singularité, l'entassement des
boucles en son sein deviendrait tel que le trou noir exploserait,
ou plutôt rebondirait en éjectant des quantités
considérables de matière. Le mécanisme
responsable de ce changement d'état serait « l'effet
tunnel » par lequel, au sein d'une réaction
de type fusion nucléaire telle qu'elle se produit dans
notre soleil, les noyaux d'hydrogène fusionnent en
noyaux d'hélium et relâchent ce faisant des photons
énergétiques. Le trou noir, pour ce qui le concerne,
deviendrait alors un trou blanc (phénomène troublant
selon une plaisanterie classique) d'une extrême densité.
Le trou blanc renverrait dans l'univers toute la matière
qu'il aurait accumulé précédemment. Resterait
à préciser à quel moment dans la vie
du trou noir et pour quelle raison se déclencherait
ce changement d'état
Les
flashs d'ondes-radio
Dans
le cas de petits trous noirs primordiaux, tels que ceux créés
lors du Big Bang, l'éjection de matière pourrait
s'accompagner ou prendre la forme de phénomènes
très rares observables de la Terre, dits flash d'ondes
radio. ( burst of radio waves) Dans le cas de grands trous
noirs, elle pourrait aboutir à la création d'un
bébé-univers inobservable en principe de la
Terre, avec ou sans émission de flashs. Il faut rappeler
que dans un trou noir, le temps n'est pas le même que
pour un observateur extérieur. Il est très ralenti.
La transformation du trou noir en trou blanc pourrait demander
des milliers voire des millions d'années, tout en paraissant
quasi instantanée, sous forme de flash, à un
observatoire terrestre.
Cette
hypothèse pourrait permettre d'expliquer l'observation
d'un radio flash intense faite le 2 novembre 2012 à
l'Observatoire d'Arecibo. Elle pourrait permettre aussi de
comprendre la raison d'une douzaine de flashs observés
précédemment par l'observatoire Parkes en Nouvelle
Galle du Sud (Australie). Elle ne donnerait cependant pas
d'explication précise sur le fait que ces flashs n'ont
été remarqués à ce jour qu'à
l'Observaroire Parkes.
Les mêmes hypothèses pourraient permettre d'expliquer
certains des phénomènes plus fréquents,
mais également mystérieux, dits flashs de rayons
gamma, supposés jusqu'à présent provenir
des confins de l'univers. Inutile de dire que beaucoup de
cosmologistes ne sont pas d'accord avec ces hypothèses.
Mais ils n'ont pas encore proposé de théories
ou même de possibilités d'expérimentation
permettant d'offrir d'autres explications, non seulement aux
flashs, mais au destin des trous noirs et finalement aux origines
mêmes de notre univers.
Pour notre part, et pas seulement par patriotisme, nous conseillons
d'apporter la plus grande attention aux développements
des hypothèses de Carlo Rovelli et Aurélien
Barrau qui ne manqueront pas de survenir dans les prochains
mois.