Article.
La méthode danalyse des systèmes réellement
complexes
Alain Cardon 15/10/2015
Pour analyser un système, les gens partent habituellement
dune décomposition a priori en différentes
catégories, ce qui détermine des sous-problèmes.
Ils vont alors résoudre les sous-problèmes,
ce qui veut dire quils auront peut-être à
les décomposer et ainsi de suite. Ce type danalyse
est très classique et se catégorise comme
étant une analyse par décompositions, partant
de sous-problèmes facilement solubles avec des moyens
classiques pour aller au problème général.
Et le problème général est alors considéré
comme la somme des solutions de tous les sous-problèmes.
On a analysé un système en le découpant
en nombreuses parties, comme il est usuel de le faire avec
les éléments technologiques dun système
technologique. Mais tous les systèmes ne se réduisent
pas à une structure mécanique faite de composants
fonctionnels.
Les
chercheurs qui pratiquent cette approche oublient, et très
souvent, que pour la plupart des systèmes que lon
étudie actuellement et qui ne sont pas réduits
à de la simple technique fonctionnelle, ceux-ci sont
constitués de sous-systèmes non indépendants
et que chaque sous-système fait évoluer les
autres et évolue selon lévolution des
autres lors du comportement du système global.
Le problème doit alors être de considérer
un système formé dun ensemble de systèmes
absolument non indépendants et en coévolution
dynamique continue. Ceci est en particulier le cas des systèmes
à étudier en sociologie, en psychologie, en
psychiatrie, en économie et dans tout le vivant.
Et cela veut dire que considérer un problème
comme la somme de sous-problèmes indépendants
est, pour les systèmes constitués de sous-systèmes
coactifs, une approche réductionniste qui donne de
mauvais résultats.
La
bonne approche conceptuelle est de considérer des
systèmes de systèmes complexes où toute
partie est coactive avec dautres simultanément
et à plusieurs échelles. Il y a des parties
initiales à structures fixes, mais le système
fonctionne en utilisant ces parties et en les modifiant.
Il y a donc toujours des systèmes dorganisation
dynamiques à considérer et il y a des structures
qui seront plus ou moins fortement évolutives à
prendre en compte.
Tout
cela revient à bien comprendre la distinction conceptuelle
entre structure et organisation, ce quavait très
clairement posé Varela, et qui a été
un peu trop oublié.
Des
systèmes multiagents massifs
Pour
utiliser cette approche, il faut penser autrement et savoir
modéliser les problèmes autrement que par
la voie mécanique avec des schémas statiques
darbres ou de graphes fixes qui sont considérés
comme des éléments de solution. Il y a bien,
à la base de létude de ces systèmes,
des graphes représentant les éléments
et leurs relations, mais le fonctionnement et lusage
des graphes détermine des parties émergentes
de graphes qui forment de nouveaux graphes organisationnels
de fonctionnement, qui sont totalement dynamiques et dont
laction modifie les graphes structurels initiaux.
Il
faut alors modéliser ces systèmes avec des
outils scientifiques adaptés. Et les seuls outils
scientifiques actuels sont des outils informatiques basés
sur des systèmes multiagents massifs contrôlés
topologiquement par des systèmes multiagents dynamiques
spécifiques, et opérant en exhibant des émergences
conceptuelles lors de leur fonctionnement, des émergences
donnant les solutions des états effectifs du système.
Mais pour en arriver là, il faut bien connaître
les Systèmes à Base de Connaissances, les
Systèmes multiagents massifs, la topologie algébrique
et le contrôle par les treillis dynamiques.
Et
on peut ensuite, lorsque le modèle conceptuel du
fonctionnement du système est bien précisé,
vérifier par lobservation physique que les
résultats donnés par le modèle sont
ceux que lon observe, ou sinon on modifie le modèle,
ce qui est le cadre de toute approche scientifique dun
problème.
Et
en remarque, je peux préciser que je suis partisan
dune réforme universitaire profonde, distinguant
clairement les laboratoires dits de recherche des laboratoires
dits de technologie, et ceci dans toutes les disciplines.
Note
de Jean-Paul Baquiast 15/10/2015
J'avance
ici - avec prudence - l'hypothèse que le cerveau
travaille dans une certaine mesure selon la méthode
résumée par Alain Cardon. Si du moins l'on
en croit la recherche présentée dans un article
précédent de ce même numéro:
"Le
mythe du rôle primo-décisionnel de la conscience
volontaire"
* Controllability
of structural brain networks http://www.nature.com/ncomms/2015/151001/ncomms9414/full/ncomms9414.html