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Article.
Course à la numérisation totale,
course au contrôle total
Jean-Paul Baquiast 23/04/2015
Une
campagne d'information certainement bien intentionnée
se développe actuellement en France,
notamment dans les milieux de l'internet,
pour dénoncer les difficultés
d'application, voire les risques pour les
libertés publiques, pouvant découler
de la loi sur le Renseignement actuellement
en préparation. On lira par exemple
sur ce sujet un article que vient de publier
le site Android (cf ci-dessous) .
Or
Marc Goodman, dans le livre Future Crimes
que nous avons présenté ici,
explique avec de très bons arguments
que le processus de numérisation globale
dans lequel nous sommes engagés, à
un niveau d'ailleurs mondial, se traduira
par le fait que les moyens dont disposeront
les criminels seront toujours plus efficaces
que ceux des services de police, tant pour
mettre au point de nouvelles techniques que
pour désamorcer les techniques officielles
de prévention et de répression.
Il ne sera même plus nécessaire
pour ces criminels de faire appel à
des techniciens spécialisés.
Les outils seront à leur disposition
sur étagère s'ils disposent
d'un peu d'argent. Ce point de vue n'est pas
seul en son genre. Il est partagé par
de nombreux auteurs.
Ces
outils seront mis au point non seulement par
les grands opérateurs ou par les laboratoires
spécialisés, mais par de simples
start-up(s) high-tech. Celles-ci inventent
sans arrêt de technologies de plus en
plus efficaces, non seulement au service d'utilisations
légitimes, mais aussi au service de
ceux voulant échapper à la loi
(cf-ci dessous l'article de Numerama). Il
en résulte une marche de plus en plus
accélérée vers une société
non seulement numérisée mais
robotisée, avec des robots autonomes
de plus en plus autonomes et donc de moins
en moins contrôlables. Ainsi s'intensifiera
la course à l'armement déjà
engagée entre les criminels de droit
commun, d'un côté, les services
officiels de justice et de police de l'autre.
Faudrait-il
dans ces conditions que les Etats renoncent
à des lois telles qu'en France celle
sur le renseignement, au prétexte qu'elles
seraient inefficaces ou dangereuses? Ceci
paraît difficile à justifier.
Ne pas prendre de tels textes ne ferait qu'encourager
le nombre des inventeurs et utilisateur de
technologies susceptibles d'utilisations criminelles
ou terroristes. Il convient pas contre de
s'assurer, dans la limite du possible, que
ces textes sont pris en toute connaissance
de cause par les législateurs, et qu'ils
sont appliqués par des services administratifs
placés sous un minimum de contrôle.
Dans
le domaine des armes dites de poing, on retrouve
le même problème. Celles-ci se
perfectionnent (kalachnikov par ex.) et se
commercialisent de plus en plus. L'ancienne
loi qui demande aux armuriers d'enquêter
sur l'honorabilité de leurs clients
est devenue tout à fait insuffisante.
Il faudra donc des lois autorisant des démarches
beaucoup plus intrusives. Mais celles-ci à
leur tour encourageront de plus en plus de
trafics d'armes, et la mise au point d'armes
dissimulées ou sophistiquées
sous l'apparence d'innocents outils, telle
une perceuse électrique. Faudrait-il
pour autant renoncer à légiférer?
Certainement pas. On constate aux Etats-Unis
les dégâts majeurs résultant
du 2e Amendement constitutionnel autorisant
le port d'armes par les particuliers.
Pour
prendre une autre comparaison, dans un domaine
très différent, selon les océanographes,
le niveau des mers pourrait monter de 1 à
plusieurs mètres d'ici la fin du siècle.
Le phénomène sera irréversible.
Les digues et autres protections seront de
plus en plus débordées. Faut-il
cependant aujourd'hui renoncer à les
fortifier, même si ceci oblige souvent
à empiéter sur les propriétés
privées de bord de mer ? Certainement
pas. La Hollande connaît depuis longtemps
déjà ce problème.
Références
*
Site Androïd . Loi
sur le Renseignement : ce qu'il faut en retenir
et pourquoi elle est dangereuse
*
Revue Numérama.
Imsi catchers
*
Marc
Goodman, Future Crimes
Rappelons
par ailleurs que Alain Cardon, dans ses ouvrages
référencés sur le site
Automates Intelligents, a depuis longtemps
abordé le problème du contrôle
total.
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