Biblionet
Reprendre.
Ni sang ni dette
par Jean-Michel Truong
Le No Man's Land, 2013, 134 p.
Présentation
par Jean-Paul Baquiast
24/04/2014
Pour
en savoir plus
* Le site du livre http://www.jean-michel-truong.com/reprendre/page/reprendre.html
* Dialogue des lecteurs avec l'auteur http://www.jean-michel-truong.com/dialogue.html
*
Nous avions précédemment présenté
un ouvrage de l'auteur: Totalement inhumaine
http://www.automatesintelligents.com/biblionet/2001/oct/truong.html
Nous
voulons recommander ici au plus grand nombre possible de
personnes s'intéressant à nos écrits
, la lecture et la discussion du dernier livre Jean-Michel
Truong Reprendre. Ni sang ni dette. Bien que paru en 2013
et ayant déjà fait l'objet de divers commentaires,
ainsi que d'un Prix de l'impertinence (remis par le Cercle
des entrepreneurs du futur), ce livre n'a pas selon nous
bénéficié de l'attention générale
et de la renommée qu'il mériterait dans l'opinion.
Cela
ne tient pas seulement au fait que l'auteur, malgré
ses références en tant qu'entrepreneur et
écrivain, ne fait pas partie du petit nombre d' « économistes
distinguées » constamment invités
par les media. Cela tient à un facteur plus grave
et plus inquiétant. Si précisément,
il ne fait pas partie des économistes dont on parle,
fussent-ils « atterrés » c'est
parce que les propositions du livre vont bien au delà
des remèdes envisagés par ceux là même
qui ne contestent pas la perte de crédibilité
de la France, le rôle démobilisateur joué
par l'Union européenne en son état actuel,
voire l'intérêt d'une sortie de l'euro.
Pour notre part, nous y voyons dans le livre deux traits
qui ne manqueront pas de le rendre dangereux, ainsi que
son auteur, aux yeux des étroites minorités
qui en quelques années ont pris possession d'une
grande partie du monde moderne, les 5% constituant ce que
l'on peut appeler en simplifiant le lobby politico-économico-médiatique
global qui nous gouverne. D'une part il s'inscrit, discrètement
mais fermement, dans une critique radicale de ce que l'on
appelle faute de mieux le Système.
D'autre
part, au lieu d'encourager à des manifestations de
refus qui seront toujours réprimées (comme
le mouvement « Occupy Wall Street aux Etats-Unis
il y a quelques années), il propose des réformes
(en forme de révolutions soft) qui auraient certes
directement pour effet de casser le Système, mais
qui seraient parfaitement réalistes et dont bénéficieraient
l'ensemble des citoyens. Encore faudrait-il que les citoyens
les imposent, soutenus par les partis politiques censés
en démocratie les représenter.
Nous ne reprendrons pas ici les propositions du livre. Pour
des raisons de facilité nous nous sommes bornés
à mentionner ci-dessous quelques extraits de textes
disponibles sur le site de l'auteur ou sur le web. Ils décrivent
mieux que nous ne pourrions le faire les mesures proposées
et les réponses aux objections qui pourraient leur
être adressées.
Bornons
nous à dire que si le style de l'ouvrage est volontairement
familier (un peu trop à notre goût), il fournit
en notes de nombreuses références extrêmement
solides justifiant le propos. Le seul inconvénient
relatif, tant des propositions que des références,
est qu'elles exigent du lecteur une grande attention, et
beaucoup de réflexion. C'est l'inconvénient
de tout discours qui ne se borne pas à reprendre
les lieux communs médiatisés. Il s'en suit
que, comme tout le monde ne sort pas de Sciences Po, il
serait bon que l'auteur écrive une version du livre
éventuellement plus longue, mais en contrepartie
plus pédagogique.
Une
question essentielle
La question essentielle que nous voudrions soulever concerne
la façon de diffuser à des millions de citoyens
une parole qui répondrait à leurs inquiétudes,
relativement au caractère de plus en plus systémique
(si l'on peut dire) de la crise du Système, sans
que cette parole soit immédiatement occultée
par les gardiens de ce Système.
Ce sont eux, où qu'ils se trouvent, en France, en
Europe, aux Etats-Unis voire dans le reste du monde qui
maîtrisent les canaux d'information et de discussion,
comme nous l'avons rappelé ci-dessus. La censure
et la répression en découlant seront encore
encore plus fortes et bloquantes, si par aventure des minorités
de citoyens activistes reprenaient pour les mener à
bien les propositions du livre, ou toutes autres s'inspirant
de la même veine. Il n'est pas certain qu'en Chine
ou dans les autres pays du BRICS, de telles propositions
rencontrent plus de succès que dans les zones soumises
au pouvoir atlantiste.
Dans l'immédiat, ce sera plutôt la désillusion,
le dégoût et la dépolitisation qui l'emporteront.
Il suffit de constater, en ce mois d'avril 2014, la déception
qui a saisi la gauche en constatant que ses représentants,
au parti socialiste, chez les Verts ou même à
l'extrême-gauche, appliquent à peu de choses
près, en France comme à l'international, les
programmes imposés par les 5% de dominants dont le
force de frappe demeure Wall Street, la Cité de Londres
et un certain nombre de banques européennes sous
tutelle.
Cependant,
avant de nous désespérer définitivement,
nous pourrions méditer le rôle joué
par Joseph Emmanuel Siéyes. Il fut célèbre
dès la publication de sa brochure « Qu'est-ce
que le Tiers-État ? » en 1789 et joua
un rôle de premier plan au début de la Révolution
française.
Pourtant,
dans les années précédentes, nul n'accordait
parmi ses amis la moindre chance de succès à
ses idées. Comme quoi le plus improbable peut se
réaliser quand les circonstances le permettent. Nous
ne pouvons que souhaiter la même influence aux propositions
de Jean-Michel Truong
Commentaires
sélectionnés par nous sur le web. Les auteurs
se reconnaitront
* Drôle de parcours que celui de cet auteur qui, après
des études de psychologie et de philosophie, s'est
retrouvé à enseigner dans une grande école
d'ingénieur, puis à fonder la première
société européenne dédiée
à l'intelligence artificielle, avant de travailler
en Chine. C'est de retour de ce pays, où il conseillait
des entreprises de haute technologie, qu'il a, dit-il, entrepris
l'écriture de ce livre (nous étions alors
au début de la campagne présidentielle, dans
une France dont l'auteur qualifie l'état de "cataleptique").
Son objectif : ni plus ni moins régler la question
de l'endettement du pays, sans impôts ni sacrifices
supplémentaires. Vous avez bien lu.
"Les cons, ça ose tout, c'est même à
ça qu'on les reconnaît", selon une célèbre
réplique d'Audiard (une référence que
le lecteur comprendra à la lecture du livre
).
Sauf que ce qu'ose ici l'auteur est digne d'intérêt :
il rêve de transformer les aides directes et indirectes
aux entreprises en
droits de tirages dont le montant
serait fonction de leurs effectifs, la dette ainsi contractée
étant garantie par les "dots" allouées
aux salariés à leur majorité
En plus d'être argumenté, c'est drôle
et impertinent.
*
L'auteur présente une méthode innovante permettant
d'abolir le déficit public et la dette qui en résulte,
sans verser de sang ni de larmes - comme tous les dirigeants
politiques semblent aujourd'hui s'y résoudre.
Ce dispositif transformerait des libéralités
- les aides de l'État aux entreprises - en crédits,
puis les administrerait par un réseau alternatif
plus diffus, plus direct, mieux informé et plus réactif
que le réseau politico-bureaucratico-bancaire actuel :
celui des citoyens eux-mêmes.
L'auteur montre comment -en administrant ainsi les deux
cents milliards annuels d'aides publiques à l'industrie
identifiées et sévèrement critiquées
par la Cour des comptes - on pourrait :
- Retrouver un excédent budgétaire dès
la première année ;
- Annuler en quinze ans la dette publique ;
- Ouvrir à toutes les entreprises, dans le même
laps de temps, jusqu'à deux mille milliards de lignes
de crédit à taux réduit ;
- Sécuriser, en diminuant de deux cents jours
leur BFR, le développement de ces mêmes entreprises
- notamment de ces ETI qui nous font tant défaut,
dans la tranche des deux cents à deux mille salariés,
si déterminantes pour la réussite de l'Allemagne
;
- Renforcer ce faisant le lien des salariés
à leurs employeurs ;
- Et pour finir relancer l'investissement et la consommation
en restituant aux contribuables - entreprises comme particuliers
- deux cents milliards par an d'impôts et de taxes.
Cette réforme accroîtrait la compétitivité
des entreprises en les affranchissant de la tyrannie des
cycles économiques comme de la volatilité
des marchés et aurait des effets positifs sur la
création d'emplois nouveaux et la sauvegarde des
emplois existants.
Elle aurait par ailleurs des impacts économiques
et sociaux de grande portée, notamment en rééquilibrant
le rapport capital-travail, de façon significative,
en faveur du travail.
En nous libérant de l'emprise de la finance internationale,
enfin, elle rendrait à l'État ses capacités
de manoeuvre et à la France sa souveraineté.
*
Avec Reprendre - Ni sang ni dette, Jean-Michel Truong quitte
pour la première fois la posture strictement analytique
dans laquelle il se cantonnait pour proposer une réforme
politique d'ampleur destinée à « reprendre »,
pour le rendre aux citoyens,
« le premier des droits humains, le plus fondamental,
jamais nommé tant il allait de soi, dont dériveraient
tous les autres et qui les rendrait tous possibles, tant
il est vrai que, sans lui, il n'y aurait même pas
eu de droit à la vie : le droit de conserver
le croît de son champ, de semer à nouveau ce
qu'il n'avait pas consommé, de s'affranchir des flux
en accumulant des stocks, des aléas en abondant des
greniers, et ainsi de s'immuniser contre les coups du sort
les mauvaises années, d'augmenter son fonds les bonnes,
bref, de domestiquer le temps avec les fruits du temps »
Cette réforme consisterait à confier à
chaque citoyen en âge de travailler - sous forme d'une
dot individuelle d'un montant moyen de 56000 euros , une
fraction des 201 milliards d'euros d'aides publiques directes
et indirectes allouées chaque année, sans
contrepartie, à moins de 10% des entreprises - pour
l'essentiel celles du CAC40 et leurs filiales20 :
« Cette dot, il ne pourrait pas la consommer.
Elle serait juste inscrite à son nom dans les livres
dune Caisse publique ad hoc. Mais quand il signerait
un contrat de travail, il ouvrirait à son employeur
un droit de tirage (DDT) sur la Caisse à hauteur
du solde de son compte. A ce solde pourrait sajouter
celui des comptes des membres de sa famille qui nen
auraient pas eux-mêmes lusage. Le salarié-banquier
serait bien sûr libre de négocier le taux de
ce crédit avec son employeur-client. Ce dernier disposerait
ainsi dune ligne de crédit permanente, à
taux inférieur à celui des banques, mobilisable
à première demande, sans autre forme de procès,
et dun montant égal à la somme des droits
de tirage apportés par ses salariés. Ce montant
représenterait le maximum de concours publics auxquels
lentreprise pourrait prétendre ».
* Selon Jean-Michel Truong, ce dispositif de répartition
des concours publics aux entreprises par le canal exclusif
des salariés aurait pour effets de :
« Annuler en quinze ans la dette publique...
ouvrir à toutes les entreprises, dans le même
laps de temps, jusquà deux mille milliards
de lignes de crédit à taux réduit...
sécuriser, en diminuant de deux cents jours leur
BFR (besoin de fonds de roulement), le développement
de ces mêmes entreprises, notamment de ces PME qui
nous font tant défaut, dans la tranche des deux cents
à deux mille salariés, si déterminantes
dans la réussite de lAllemagne... renforcer
ce faisant le lien des salariés à leurs entreprises...
et pour finir restituer aux contribuables entreprises
comme particuliers deux cents milliards par an dimpôts
et taxes.. »
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