Sciences
politiques. Le mafiastan
Jean-Paul
Baquiast 24/04/2014
Robert
Fisk, dans le journal britannique The Independent, confirme
ce que chacun devinait intuitivement. Le Moyen Orient est
devenu non pas un califat islamique global, comme le craignaient
certains, mais le califat global des mafias.
Il s'agit
évidemment en premier lieu de mafias arabo-islamiques,
mais ce n'est pas le combat pour Allah qui les motive en
priorité. C'est le combat pour mettre la main sur
les centaines de milliards de pétro-dollars payés
sans hésiter par les Occidentaux aux Etats producteurs
de pétrole. Ces dollars alimentent une corruption
généralisée, sans frontières
et sans idéologies, sauf la prise en mains par elle
de toutes les structures sociales.
Un flot
toujours renforcé de corruption et de trafics a englouti
le Moyen-Orient, sans exceptions. Il n'est plus rien qui
ne s'achète, tant par la violence des armes que par
l'argent. Aucun pays n'est indemne. Aucune valeur ne résiste.
Les Occidentaux, en premier lieu les Américains,
sont évidemment les premiers responsables.
Non
seulement ils achètent le pétrole sans compter
et sans se préoccuper de ce que deviennent les pétro-dollars.
Ceci d'autant plus qu'une partie de ceux-ci alimentent les
commandes passées à leurs entreprises, lesquelles
ne s'imposent que par mafias interposées. Combien
d'argent mafieux a-t-il ainsi été versé
pour la construction de tours comme la Burj-Dubai ? Que
sera le budget maffieux consacré à la future
tour de 1km de haut annoncée par l'Arabie saoudite?
Les
Occidentaux, Américains en tête, ont à
l'origine, en déclenchant des guerres pour le contrôle
du Moyen-Orient et de son pétrole, détruit
sans hésiter les Etats et sociétés
traditionnelles. L'Irak, l'Afghanistan, la Libye, indirectement
la Syrie, ont été livrées à
des seigneurs de la guerre. Ceux-ci avaient été
initialement financés par l'Amérique, avant
qu'ils ne prennent leur indépendance grâce
aux comportements mafieux imités de ceux régnant
dans certains pays d'Amérique latine et d'Europe.
Le Pakistan
et sans doute aussi l'Égypte, avec leurs mafias militaires,
prennent le même chemin. Ne parlons pas du cas bien
connu des Etats du golfe Persique et de l'Arabie saoudite,
qui par la corruption achètent une partie des pays
européens. L'Arabie saoudite, on le sait, finance
les Etats et les banlieues européennes, soit disant
pour le plus grand bien de l'islamisation, mais aussi pour
mettre la main, grâce à la corruption, sur
ce qui demeure de richesses en Europe.
L'argent
mafieux génère évidemment une partie
du terrorisme. Les jeunes européens musulmans allant
mener le djihad en Syrie, avant de revenir en Europe y reprendre
ce grand jeu, sont financés, ainsi que leurs armements,
par les profits dus à la drogue, aux enlèvements
et trafics divers menés par les Etats de la région,
ainsi que par des intérêts européens
eux-mêmes mafieux.
Certains
esprits optimistes, en Europe, se rassurent en pensant que
tout cela aura une fin, dans quelques décennies,
avec la fin du pétrole. Mais les mauvaises habitudes,
une fois prises, demeurent. Aucun Etat, aucune administration
se voulant répressive ne résiste aux bakchichs
assortis de menaces. L'Europe, dans sa grande vertu, dénonce
la corruption régnant en Russie. Au contact du mafiastan
moyen-oriental, elle en prendra rapidement elle-même
le chemin.
Que
dirait Lawrence d'Arabie s'il revenait ? Les antiques rezzous
feraient bien pâle figure devant les mafias modernes.
* Lire Robert Fisk The
Middle East we must confront in the future will be a Mafiastan
ruled by money
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