Article.
Lors d'une EMC récente, la Terre a eu de la chance
Jean-Paul
Baquiast 25/03/2014

This
image captured on July 23, 2012 at 12:24 a.m. EDT shows
a coronal mass ejection that left the sun at the unusually
fast speeds of over 1,800 miles per second (credit: NASA/STEREO)
Les
Terriens considèrent généralement que
les évènements cataclysmiques de grande taille,
tels la rencontre avec un astéroïde tel que
celui censé avoir provoqué une extinction
majeure d'espèces vivantes il a 60 millions d'années,
sont très rares et par ailleurs inévitables.
Il ne serait donc pas utile de s'en préoccuper, en
comptant sur la chance pour qu'ils ne surviennent pas dans
les prochains siècles.
Cela
n'est pas le cas des éjections de masse coronale
(EMC) provenant de la couronne solaire. Celles ci, dont
les causes semblent assez diverses, prennent la forme de
flux de plasmas (particules électriquement chargées
et électrons) pouvant atteindre la taille de plusieurs
diamètres solaires et se déplaçant
dans le système solaire à très grande
vitesse. Elles se produisent régulièrement,
mais le plus souvent n'affectent pas la Terre car elles
ressemblent au rayon lumineux d'une lampe de poche, n'éclairant
que les objets directement ciblés. Vu le diamètre
du soleil, il y a peu de chance d'une rencontre avec notre
planète.
Cependant
de telles rencontres sont fréquentes. La plupart
ne sont pas d'une très grande intensité. Elles
perturbent les réseaux radio-électriques,
sans infliger de dommages graves. L'histoire se souvient
cependant d'une série d'éruptions solaires
de grande violence, dite Carrington Event, parce
qu'elle fut étudiée par l'astronome anglais
de ce nom. L'EMC a eu lieu en 1859, mettant à mal
les réseaux télégraphiques, notamment
aux Etats-Unis. Un télégraphiste aurait même
péri électrocuté à son poste
Aujourd'hui, une telle EMC aurait
provoqué des dommages majeurs dans tous les réseaux
électriques et radio-électriques dont la Terre
est désormais entourée. Il en aurait résulté
de nombreuses pertes de vies humaines (que l'on pense aux
avions en vol) et des dégâts, temporaires ou
durables, se chiffrant par milliers de milliards.
Or
des astronomes américain et chinois ont analysé
une telle tempête magnétique survenue récemment.
Ils ont publié un article à ce sujet le 18
mars dans le journal Nature (voir référence
ci-dessous). L'évènement a été
détecté par la sonde de la Nasa STEREO A,
destinée, avec sa jumelle STEREO B placée
de l'autre côté de la Terre, à l'étude
de la couronne solaire, des perturbations du vent solaire
et des EMC.
Le
22 juillet 2012, une large éruption solaire a propulsé
un nuage magnétique à travers le vent solaire.
Sa vitesse était de 2000 km/s, quatre fois celle
d'une EMC plus usuelle. L'émission a coupé
l'orbite de la Terre, mais par chance celle-ci, comme les
autres planètes du système solaire, se trouvait
à ce moment là de l'autre côté
du soleil. Les chercheurs ont estimé que l'énergie
éjectée, en deux fois, à un intervalle
de 15 mn, équivalait à celle d'un milliard
de bombes à hydrogène. Si la Terre s'était
située dans sa direction, son champ magnétique
aurait littéralement éclaté, provoquant
des dégâts immenses.
Les
physiciens s'efforcent actuellement de mieux comprendre
la cause de tels phénomènes. Mais cela ne
permettra pas de proposer des moyens pour les prévenir.
Nous nous étions fait l'écho, dans un article
précédent, des nombreux investissements qui
seraient nécessaires pour minimiser leurs effets,
par exemple ne pas construire de vastes réseaux interconnectés.
Mais les coûts pour les usagers et la gène
qu'ils ressentiraient seraient tels que rien vraisemblablement
ne sera décidé en ce sens. Il nous restera
à compter, dans ce domaine comme dans celui des autres
cataclysme d'origine cosmologique, sur la chance pour qu'ils
ne se produisent pas, disons, avant quelques temps.
Référence
* Nature:
Observations
of an extreme storm in interplanetary space caused by successive
coronal mass ejections
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