Editorial
2.
Applications
scientifiques: peu d'argent requis, beaucoup de bénéfices
et d'emplois
Jean-Paul Baquiast et Christophe Jacquemin - 27/08/2012
Nous
sommes de ceux qui nous désespérons, au
sens propre, de voir que l'actuel gouvernement français
laisse passer les mois sans envisager de promouvoir
quelques unes des applications scientifiques qui pourraient
donner à notre pays, et à l'Europe en
parallèle, les gains de productivité et
d'emplois que l'on recherche désespérément.
Les têtes pensantes et militantes préfèrent
à la place discuter de l'avenir des gaz de schistes
et autres machines à détruire l'environnement
au profit de quelques multinationales.
Mais
de quelles applications scientifiques parlez vous, demanderont
nos lecteurs ? Il suffit d'ouvrir n'importe quelle revue
scientifique pour en identifier un grand nombre. Certes,
il faudra un peu d'argent et de procédures intelligentes
pour encourager de tels investissements, mais les coûts
en seraient minimes au regard des retombées.
Donnons deux exemples, tirés du dernier numéro
de la revue britannique NewScientist du 25 août
2012. Ils sont très différents, c'est
pourquoi nous les mentionnons.
Le premier concerne la fabrication de biocarburants
à partir du recyclage biologique des eaux usées.
Le thème a été souvent évoqué,
mais aucun solution à grande échelle n'a
encore été mise en oeuvre, essentiellement,
dirions-nous par manque d'intérêt politique,
face aux lobbies de l'énergie traditionnelle.
Jonathan Trent, chercheur de l'Université d'océanographie
Scripps à San Diego, Californie, propose de généraliser
un processus faisant appel à des algues, dans
un mélange d'eaux usées et d'eaux marines
ou fluviales, qu'il a nommé OMEGA (Offshore Membrane
Enclosures for Growing Algae). Les bénéfices,
pour des investissements modestes, pourraient être
considérables. La Nasa s 'y intéresse
(http://lunarscience.nasa.gov/articles/omega/).
Pourquoi pas la France ? Poser la question est y répondre.
Nous n'aurons pas la méchanceté de commenter.
Un
autre domaine, que nous avons choisi très différent,
est celui des microsatellites dits Cubesats (http://en.wikipedia.org/wiki/CubeSat
).
Il s'agit de concevoir des engins de quelques kilos
susceptibles de nombreuses applications spatiales, en
orbite basse voire sur des planètes telles que
la Lune ou Mars. Ces satellites profitent de capacités
disponibles dans les grands lanceurs. Certes, les réaliser
et les mettre en oeuvre n'est pas à la portée
du premier venu, mais des universités où
même des lycées techniques ont déjà
investi dans ce secteur, y compris marginalement en
France. Les retombées, là encore, pourraient
être multiples, et les coûts, en proportion,
infimes. Mais qui en a entendu parler, à l'heure
où le robot Curiosity monopolise l'attention
? Quel ministre de la recherche ou du redressement industriel
s'y intéresse ? _______________________.
Que
l'on ne se trompe pas sur ces propos. Les deux exemples
cités ne pourraient à eux seuls répondre
aux besoins. Mais il en existe des dizaines d'autres.
Les coûts accumulés ne seraient pas négligeables,
mais les retombées seraient au rendez-vous.
Si
la France disparaît des radars de la société
scientifique, elle n'aura qu'à s'en prendre à
elle-même.
Retour au sommaire