Editorial
Des perspectives de nouvelles croissances
Jean-Paul Baquiast,
Christophe Jacquemin - 26/04/2012
Début
mars, en pleine campagne présidentielle française,
plusieurs dirigeants européens conservateurs
apportaient officiellement leur soutien au président-candidat
Nicolas Sarkozy. D'une façon générale,
on a pu penser jusqu'à ces derniers jours que
le Conseil européen (composé des chefs
d'Etat et chefs de gouvernement) se rangeait à
100% derrière Nicolas Sarkozy, malgré
une aversion ressentie par certains de ses membres à
l'égard du président français.
Plus
généralement, les droites européennes,
obligées de choisir leur camp, ne s'embarrassaient
pas de scrupules. Pour elles, une France restant à
droite, globalement favorable aux grands intérêts
financiers et à Wall Street, resterait préférable
à une France basculant à gauche, risquantde
redonner du tonus à leurs oppositions socialistes.
Seul le Premier ministre belge di Rupo, socialiste,
se sera manifesté en faveur de François
Hollande, quelques jours avant le premier tour de votes.
Les
résultats de celui-ci, attribuant la troisième
place au Front national, qui a recueilli près
de 18% des voix, pourraient bien modifier les tonalités
des soutiens européens. Les réactions
ont été nombreuses au sein de l'Union
européenne. Certes, bien qu'inquiète,
la chancelière allemande n'a cependant pas changé
de cap et a réitéré son soutien
à Nicolas Sarkozy. Mais la tournure que pourrait
prendre la campagne d'ici le 6 mai en préoccupe
plus d'un. Réunis au lendemain du premier tour
à Luxembourg, les ministres européens
des Affaires étrangères n'ont pas hésité
à mettre en cause la ligne choisie par la France,
notamment sur l'Espace Schengen.
Olivier
Bailly, un des porte-parole de la Commission européenne,
a incité les responsables européens à
ne "pas céder à la tentation des
discours populistes" et à "faire
attention à la menace populiste, à la
propagation de ses idées parce qu'elles sont
fondamentalement contraires aux idéaux portés
par la construction européenne". La
commission peut légitimement s'en inquiéter,
puisque le pourcentage des idées sinon encore
des votes dits populistes, semble devoir trouver un
équilibre dans les prochains mois autour de 20%
à 30% des électorats européens.
Par populisme, on entendra un mélange confus
de retour à des "puretés" nationales
ou provinciales exacerbées, de refus de l'euro,
de crainte devant les changements ouverts par les nouvelles
sciences et technologies. Pour notre part, nous n'y
ajouterons pas la volonté de résister
à un islam de combat, volonté dans l'ensemble
présente dans tous les partis européens,
qui répond à un réflexe salutaire.
En
conséquence inverse, une large voie, sinon un
boulevard, pourrait alors s'ouvrir devant ceux qui proposeraient
non seulement de cesser de déconstruire les services
publics et les protections sociales offertes par les
Etats européens, mais de mettre ceux-ci, au sein
d'une Europe définie comme interventionniste
et pro-active, au service de la création de nouvelles
croissances.
Les
potentialités offertes par des stratégies
d'investissement de moyen et long terme, soutenues par
les pouvoirs publics et européens
Ce
pourrait être à la France de reprendre
ce discours, en exposant les potentialités offertes
par des stratégies d'investissement de moyen
et long terme soutenues par les pouvoirs publics nationaux
et européens. Les choix ne manquent pas, dans
tous les domaines impliquant précisément
les nouvelles sciences et technologies. Nous allons
prochainement une nouvelle fois en proposer une liste,
à titre de démonstration, car les opinions
refusent encore de croire aux perspectives qu'elles
offrent, ou à leurs retombées en termes
de création d'emplois et de start-up.
L'Europe
s'est donnée de tels objectifs, notamment dans
le document Europe 2020 http://ec.europa.eu/europe2020/index_fr.htm
. Mais
il ne s'agit encore que de thèmes généraux.
Il conviendrait de le nourrir par des propositions de
recherche/développement ou d'industrialisation
intéressant des thèmes précis concernant
cet agenda.
Un exemple : Envisat
Bornons-nous
ici à en donner un petit exemple. Le satellite
européen Envisat vient de cesser de fonctionner,
après plusieurs années de bons et loyaux
services prolongés 4 ans au-delà de sa
durée prévue.
Il fournissait des informations essentielles en matière
de surveillance de la Terre, de l'atmosphère
et des océans. Faute d'avoir préparé
son remplacement, l'Europe devra attendre plusieurs
années avant de lui donner un successeur grâce
à la série SENTINEL. De nombreuses activités
et emplois européens en souffriront. Voici qui
n'aurait pas dû se produire si des gouvernements
dynamiques avaient siégé au conseil européen
et au conseil de l'Agence spatiale européenne.
On notera que le satellite PLEIADES du Cnes, là
aussi un "produit régalien", a permis
de prendre quelques images d'Envisat.
Il
ne faut pas être grand clerc pour faire l'hypothèse
que, si un gouvernement de gauche en France proposait
des projets d'investissements stratégiques en
commun dans l'esprit qui avait conduit au lancement
d'Envisat, il trouverait dans les pays européens
le soutien de tout ce que ces pays comptent, socialistes
ou pas, de forces scientifiques, industrielles et coopératives
dynamiques.
NB.
On se méfiera cependant des possibilités
de détournement de la part d'un gouvernement
affairiste de structures telles que le
Fonds stratégique d'investissement français
: voir à cet égard Mediapart.
Références
* Envisat : http://fr.wikipedia.org/wiki/ENVISAT
* Article de Futura Sciences :http://www.futura-sciences.com/fr/news/t/astronautique/d/envisat-en-perdition-photographie-par-le-satellite-pleiades_38269/
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