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Article
La
neuroéconomie et la propension à l'équité
par Jean-Paul Baquiast 19/06/2010
|

La
neuroéconomie soulève en général
plus d'inquiétude que d'enthousiasme. Son objectif
est d'étudier les associations entre tel ou tel comportement
économique et les changements neuronaux ou endocriniens
qu'il induit chez un sujet. Rien d'inquiétant à
cela en principe, sauf que l'on peut craindre, dans ce domaine
particulier des neurosciences comme d'ailleurs dans d'autres
domaines, que les recherches soient principalement financées
par des agences de marketing commercial ou politique, afin
le cas échéant d'en tirer des recettes pour
prédire sinon prédéterminer les comportements
désirés chez des individus non avertis.
S'il
apparaissait ainsi que la testostérone, convenablement
administrée, induisait un comportement accueillant
à l'égard d'une personne ou d'un produit,
pourquoi ne pas envisager, dans un univers pas très
différent du nôtre, qu'elle soit administrée
subrepticement pour encourager les achats ou les votes favorables.
Ces
soupçons ne devraient cependant pas suffire pour
jeter l'opprobre sur la neuroéconomie. Toute recherche
peut en effet être pervertie par les commerçants
et les politiciens. On ne fermera pas pour autant les laboratoires.
Ceci d'autant plus que, concernant la neuroéconomie,
elle peut faire apparaître des conclusions encourageant
non pas les comportements basés sur une poursuite
égoïste du profit mais au contraire ceux favorisant
la coopération et le partage.
C'est
précisément ce qui semble être le cas.
Des études conduites au sein de l'Institut pour les
recherches empiriques en économie de Zurich montrent
ainsi, comme le rapporte l'entretien avec Ernst Fehr, professeur
de microéconomie expérimentale au sein de
cet Institut, publié par le NewScientist (1er mai
2010, p. 26), l'importance des motivations altruistes dans
les décisions économiques.
Des
expériences de laboratoires confirment ainsi ce que
la pratique millénaire avait montré. Les humains,
loin de chercher en permanence à s'exploiter réciproquement
(ce qu'ils font aussi) trouvent de solides récompenses
dans l'assistance, le partage et la coopération.
Fehr a mis en évidence quelques unes des bases neurales
ou des stimulants endocriniens favorisant de tels comportements.
Il n'y a d'ailleurs rien de surprenant puisque les biologistes
signalent depuis quelques temps l'existence de décisions
relevant de ce que nous appelons le sens moral chez divers
animaux, quand il s'agit notamment de partage de nourriture.
Les
moralistes à l'ancienne seront certainement contrariés
de constater que les vertus qu'ils recommandent avec force
invocation de préceptes ou textes religieux sont
en fait inscrits dans la nature des organismes supérieurs
vivant dans des sociétés en tirant des avantages
compétitifs.
Pour les économistes et les hommes politiques se
disant démocrates, au contraire, ces conclusions
de la neuroéconomie ne pourront qu'encourager les
modes de production et d'échange faisant une large
part au partage et à la coopération. L'homo
economicus pur et dur, sur qui repose depuis plusieurs
siècles la théorie économique libérale,
se révèle une fois de plus une illusion dangereuse,
dont les démocraties devraient se débarrasser.
Dans
cette direction de recherche, nous ne pourrions qu'encourager
l'investigation des bases neurales du sens du service public,
tout aussi répandu que l'instinct de profit personnel.
A quand la neurofonction publique? Elle ne fera peut-être
pas n'apparaître que des motivations nobles. Mais
il vaudra mieux le savoir.
Pour
en savoir plus
Ernst Fehr
http://en.wikipedia.org/wiki/Ernst_Fehr
Institute for Empirical Research in Economics http://www.iew.uzh.ch/index_en.html