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Editorial
G20
: le dit et le non dit
par
Jean-Paul Baquiast et Christophe Jacquemin
22/04/2008
|
Un
G20 à ne pas confondre avec une véritable
prise de conscience mondiale des problèmes de la
planète. La démarche entreprise n’est
pas à rejeter, mais elle ne doit pas cacher tout
ce qui resterait à faire, dans un monde où
l’intérêt général l’emporterait.

La
réunion des chefs d’Etat des vingt pays les
plus puissants du monde, dite G20, qui s’est tenue
à Londres le 2 avril, a été présentée
par tous comme un succès. Face à la crise
financière mondiale, les gouvernements et les grandes
institutions internationales intéressées,
FMI et OMC notamment, décidaient de réagir
et proposer des mesures coordonnées. Un catalogue
de telles mesures, visant à réguler et «
moraliser » le monde de la finance, jusque là
rebelle à tous contrôles, a été
arrêté. Pour les pays européens, France
et Allemagne en tête, qui avaient dès le précédent
G20 affirmé cette volonté, il s’agit
d’un succès. Barack Obama et Gordon Brown,
jusque là réservés, face à l’hostilité
de Wall Street et de la City, ont pour leur part réussi
à montrer qu’ils prenaient du recul face aux
puissants lobbies de la finance dite anglo-saxonne. Le groupe
des BRIC, qu’il vaudrait mieux par ordre d’importance
nommer les CIRB (mais c’est moins euphonique), Brésil,
Russie, Inde et Chine, a fait reconnaître son existence
officielle compte tenu des potentiels énormes de
développement (voire de catastrophes) qu’il
recèle. Le FMI enfin s’est présenté
non comme le destructeur des économies des pays pauvres
mais comme leur sauveur potentiel.
On
devine que tout ceci, sans être totalement inexact,
cache des points que l’on n’a pas voulu souligner.
Le premier concerne les Etats-Unis. Barack Obama voulait faire
de ce sommet la réaffirmation de la volonté
américaine d’imposer sa loi au monde, notamment
à travers les banques américaines et le dollar,
monnaie d’échange universelle. Il a dû
jouer en fait beaucoup plus modestement. Les banques américaines
restent en sursis, malgré les avantages inouïs
dont elles ont bénéficié de la part de
l’Etat fédéral, aux dépens des
épargnants et des contribuables. Leur actuel «
redressement », proclamé à grands cris,
paraît relever plus de la propagande que de la réalité.
Le dollar est désormais fragilisé, menacé
par les BRIC de ne plus être utilisé dans leurs
échanges internes, et remplacé par un paquet
de monnaies plus solides : euro, yuan, yen. Quant aux grandes
stratégies diplomatico-militaires ayant fait la force
de l’Empire américain depuis un demi-siècle,
elles paraissent toutes en difficulté, voire en recul.
Il s’agit d’ailleurs à notre avis d’une
excellente chose.
Un
deuxième point concerne la faiblesse persistance des
pays de l’Union européenne, gangrenés
par la crise financière et plus généralement
économique et sociale due à un refus permanent
de politiques unies d’harmonisation législative
et de grands investissements publics dans les sciences, les
technologies avancées et dans la formation supérieure.
Ni Angela Merkel ni Nicolas Sarkozy, et a fortiori pas Gordon
Brown, ne peuvent cacher que derrière leurs exhortations
à la relance se trouve un vide sidéral. Comment,
dans ces conditions imposer une quelconque discipline aux
investisseurs internationaux qui vont continuer, y compris
dans les paradis fiscaux dont la disparition ne sera pas pour
demain, de décider pour les Européens de ce
pour qui et pour quoi ils devront travailler – à
supposer que les Européens conservent du travail ?
Si
enfin les BRIC peuvent incarner la montée en puissance
des pays émergents, et aussi celle des inévitables
difficultés qu’ils vont rencontrer, ils ne peuvent
et ne veulent pas parler au nom des pays vraiment pauvres,
plus immergés qu’émergents. Le FMI faute
de moyens ne le pourra pas non plus. Ce n’est d’ailleurs
pas pour cela qu’il a été créé
et renforcé aujourd’hui. Le G20 n’est donc
pas pour eux. L’ONU pourrait les représenter,
mais le G20 n’est pas une instance onusienne et demeure
soumis à la volonté de ses membres les plus
puissants. Ceux-ci ne se préoccupent des pays pauvres,
notamment africains, que pour exploiter à leur place
leurs ressources naturelles et leur interdire toute émigration
hors de leurs frontières.
Ceci
nous conduit à la véritable conclusion qu’il
faudrait tirer de ce G20 présenté "comme
une réussite exemplaire de la communauté internationale
face à une crise dite systémique". La volonté
de limiter les dossiers à ceux de la finance permet
de ne pas voir que les vrais problèmes, générateurs
des difficultés économiques mondiales actuelles
et plus encore des futurs désastres écologiques
et environnementaux déjà enclenchés,
n’ont pas été abordés. Peut-être
aurait-ce été trop demander, pour un début
de concertation internationale ? Mais il ne faut pas dissimuler
le fait que dès cette année, au-delà
des réunions destinées à poursuivre le
processus de Kyoto (qui se présentent mal), de futurs
G20 étendus devraient dès maintenant être
préparés, avec des programmes extrêmement
autoritaires et régulateurs visant à changer
complètement l’ordre économique, politique
et démographique mondial. On en est loin. Nous en avons
souvent traité sur ce site. Inutile d’y revenir
dans cet éditorial. Mais nous aimerions que les Européens,
qui pourraient faire beaucoup dans un sens salvateur, grâce
à leurs indiscutables traditions de civilisation, fassent
mieux qu’actuellement entendre leurs voix. Ce ne sont
malheureusement pas les dirigeants actuels qui s’y risquent,
ni leurs conseillers techniques...