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Manifestation
Conclusions du Congrès de Madrid sur la souveraineté
technologique européenne (3, 4 et 5 octobre
2005)
par
Eduardo Martinez de la Fé, initiateur du Congrès
21 novembre 2005
Voir le site du Congrès http://www.soberaniatecnologica.com/ |

Présentation
des conclusions du 2e CONGRÈS sur la SOUVERAINETÉ
TECHNOLOGIQUE DE L'EUROPE
Centre de Conventions de l'Hôtel Meliá Castilla
Madrid, les 5, 6 et 7 octobre 2005
Le 2e Congrès sur la Souveraineté Technologique
de l'Europe, faisant suite au premier de ce genre tenu à
Paris en juin 2004 (http://www.europe-puissance-scientifique.org/),
s’est déroulé dans le Centre de Conventions
de l'Hôtel Meliá CastillA de Madrid les 5,
6 et 7 octobre 2005.
Pendant
le congrès, ont été prononcées
dix conférences magistrales et tenues douze tables
rondes. Un total de 521 personnes se sont inscrites, auxquelles
il faut ajouter 170 collaborateurs envoyés par les
entreprises en qualité de contributeurs, ce qui élève
le niveau de participation à presque 700 experts.
Au
congrès ont été représentées
les principales institutions européennes et espagnoles:
le Parlement Européen, la Direction Générale
de la Recherche de la Commission Européenne, l'Agence
Spatiale Européenne, l'Union Paneuropéenne
Internationale, représentée par son président,
M. Alain Terrenoire, ainsi que The Open Geospacial Consortium,
Eurocontrol, entre autres.
En
ce qui concerne les institutions espagnoles on souligne
particulièrement la participation de l'Institut National
de la Technique Aérospatiale (INTA), appartenant
au Ministère de la Défense, le Centre pour
le Développement Technologique et Industriel (CDTI),
appartenant au Ministère de l'Industrie, et la Direction
Générale de Politique Technologique, appartenant
au Ministère de l'Éducation et de la Science,
diverses universités, l'École d'Organisation
Industrielle, l'Association espagnole de Planification Stratégique,
la confédération patronale CEOE et l'Union
Professionnelle, ainsi que les différentes associations
d’ingénieurs, comités spécialisés
de l'Institut de l'Ingénierie de l'Espagne et d’importants
groupes de communication comme le Groupe Prisa, éditeur
du journal El Pais.
Le
Gouvernement Espagnol a participé activement à
la conception du congrès, particulièrement
à travers la vice-Première ministre, le Ministère
des Affaires Étrangères et le Bureau Économique
du Président du Gouvernement. Durant le congrès,
cette collaboration s'est concrétisée lors
de la séance inaugurale, qui a été
présidée par le Secrétaire d'État
des Universités et de la Recherche, M. Salvateur
Ordoñez, représentant la vice-première
ministre, Mme María Teresa Fernández de la
Vega.
L'appui
du Gouvernement a de même été mis en
évidence lors du dîner du congrès, qui
a été présidé par Miguel Ángel
Navarro, Secrétaire Général pour l'Union
Européenne du Ministère des Affaires Étrangers,
en représentation de son titulaire, M. Miguel Angel
Moratinos, et dans l'acte de clôture, qui a été
présidé par le Directeur Général
de Télécommunications, M. Bernardo Lorenzo,
en représentation du Secrétaire d'État
pour la Société de l'Information, D Francisco
Ros. Par ailleurs, le gouvernement français a été
représenté au congrès à travers
la présence du Haut Représentant pour l'Intelligence
Économique, M. Alain Juillet, que je remercie ici
une fois de plus pour son appui.
Effort
conjoint
En
Espagne ce congrès a été le résultat
d'un effort conjoint associant d’une part l'Institut
de l'Ingénierie de l'Espagne, lequel représente
100.000 ingénieurs supérieurs et qui est l'âme
de l'innovation dans notre pays, comme il l’a été
durant ses cent années d'histoire – et d’autre
part le Groupe de communication
Mediaedge:cia, qui constitue une référence
du savoir faire du patronat espagnol dans un secteur aussi
sensible que celui de la publicité et la communication
de masses.
Enfin,
la revue électronique pour la diffusion de la science,
la technologie et la culture, Tendencias21, a repris des
initiateurs français du concept de souveraineté
technologique européenne l'idée de développer
en Espagne un congrès à Madrid sur ce thème
très important.
En
agissant ensemble, ces trois institutions ont suscité
l’appui de certaines des principales entreprises espagnoles
de dimension européenne, particulierement Telefonica
y Endesa, qui ont accepté de contribuer à
son financement. Grâce à cet appui économique,
plus de 20 personnes ont pu travailler à l’organisation
du congrès pendant six mois.
Grâce
à toutes ces collaborations nous avons concrétisé
ce qui à notre avis devrait devenir un projet innovateur
européen, caractérisé par une recherche
scientifique et industrielle ouverte sur la société,
des entreprises en phase avec leur environnement, des mass
media informant la société des enjeux du futur.
Conclusions
théoriques et pratiques
1.
Le premier apport de ce congrès concerne le concept
de souveraineté. Certains des participants ont exprimé
leur étonnement de voir associer un concept relevant
de la théorie de l'État, tel que la souveraineté,
avec le développement technologique. La réalité
est que le concept de souveraineté doit impérativement
évoluer aujourd’hui, puisqu'il a perdu une
grande partie de son sens original sous l'effet de la globalisation.
Le congrès, en ligne avec ce qui avait été
débattu à Paris en avril 2004, a proposé
une nouvelle acception du terme contemporain de souveraineté.
La souveraineté est comprise aujourd'hui comme la
capacité d’agir de l’Etat, aux plans
politique, social et économique, tant au niveau interne
qu’ externe. Le concept de souveraineté technologique
intervient alors en priorité puisqu’il oblige
à prendre en compte la technologie comme facteur
d'influence et de capacité de manœuvre. Sans
le contrôle de certaines technologies, la souveraineté,
simplement, ne peut pas être exercée.
2.
Une autre conclusion importante retenue par le congrès
est que l'état actuel de la science et la technologie
en Europe oblige à rattraper le retard du vieux continent
au regard des Etats-Unis et de l'Asie. La grande question
qui se sont posée les participants a concerner les
modalités selon lesquelles l'Europe pourra récupérer
le retard, notamment dans les sciences et les technologies
dites émergentes et convergentes? Le débat
sur cet sujet a été passionnant…
3.
A été mis en évidence le fait que l'Europe
ne possède pas, comme les Etats-Unis et la Chine,
notamment, de gouvernement central fort qui puisse affecter
d'importants investissements publics à la “securité
nationale”. La Commission Européenne ne dispose
pas de l'autorité ni des budgets nécessaires
pour ce faire. Malgré ce handicap institutionnel,
les participants au congrès ont demandé un
renforcement du financement public à la recherche,
tant dans les Etats européens qu’au plan du
budget communautaire..
4.
Quelques participants ont évoqué l'exemple
du CERN de Genève ou du programme ITER. Ces organismes
fonctionnent dans le cadre de la coopération renforcée,
en associant les États et les entreprises afin d’investir
conjointement dans un réseau de compétences
doté d’un grand équipement pour lequel
l'institution sert de noeud de réseau. Peut-il appliquer
ce modèle à d'autres domaines? La question
est restée ouverte.
5.
Il y a eu aussi un consensus général relatif
au spatial. L’Agence Européenne de l’Espace
devrait être renforcée notamment pour développer
des programmes duals (civils et militaires) dont le grand
projet Aurora destiné à une exploration européenne
de Mars devrait être le principal support.
6.
De même, quelques participants ont fait valoir que
l'Agence Européenne de la Défense doit financer
davantage de programmes relatifs à la défense
et la sécurité, y compris la sécurité
civile.
7.
Ce congrès a clairement montré que l'Europe
peut et doit concevoir des stratégies de recherche
et de développement à longue portée
qui mobilisent des volontés et des investissements,
produisent de nouveaux emplois et confèrent aux pays
membres de l'Union un rôle dans les relations internationales
qui soit proportionnel aux dimensions géographiques,
démographiques, économiques et technologiques
de l’Europe.
8.
Deux faits fondamentaux ont été généralement
évoqué lors des interventions au Congrès:
•
l'occasion à saisir qui représente pour l'Europe
la Grande Convergence Technologique du 21e Siècle
• la nécessité que l'Europe intensifie
son effort en recherche et développement pour atteindre
un niveau plus compétitif sur la scène mondiale.
9.
Quelques rapporteurs ont indiqué à ce sujet
sur le fait que la sécurité de l'Europe dans
la nouvelle scène internationale est associée
au contrôle de certaines technologies clefs.
10.
Ils ont aussi souligné que le secteur spatial s'avère
spécialement attrayant pour réveiller l'intérêt
des investisseurs publics et privés, particulièrement
parce qu'il représente un nouvel horizon pour la
sécurité commune (“le spatial offre
une opportunité unique pour développer des
stratégies de gestion de crise et de prévention”
selon Fernando Davara).
13.
La nouvelle scène internationale impose la révision
des politiques technologiques et industrielles de l'Europe,
laquelle se révèle la région la plus
libérale du monde et la plus vulnérable, ce
qui l’expose à des concurrences déloyales
provenant d'autres pays et régions.
14.
La révision de ces politiques technologiques et industrielles
implique le développement de l'Intelligence Économique,
comprise comme information stratégique au service
des entreprises et des institutions, puisque le développement
technologique qui n'est pas dûment protégé
perd toute capacité de s’imposer sur les marchés
globaux.
15.
L'Espagne n’occupe pas une position privilégiée
dans l'univers européen de la science et la technologie.
Elle a besoin de beaucoup développer ses investissements
privés en R+D et ses aides publiques à l'innovation
afin d’atteindre un niveau plus significatif dans
l'espace européen.
16.
On ajoutera que beaucoup de questions ont été
abordées dans les 12 tables rondes tenues en complément
des sessions magistrales. Ces tables rondes, toutes de haut
niveau, ont abordé les divers thèmes intéressant
la souveraineté technologique, depuis la sécurité
dans la société de l'information, les nouvelles
conceptions de la défense, les transports avancés,
l'énergie ou les réactions au changement climatique.
17.
De ces problématiques, nous pouvons retenir un exemple,
l’accent mis sur la conception différente du
développement technologique qui existe en Europe
et aux Etats-Unis, sujet récurrent des deux tables
consacrées à la convergence technologique
du 21e Siècle et des NBIC. De l’autre côté
de l'Atlantique on accepte comme possible et désirable
l'amélioration de l'espèce humaine avec tous
les défis que cela implique. En Europe ces objectifs
sont considérés avec méfiance et les
horizons technologiques abordés sont plus linéaires.
19.
Le congrès espagnol, finalement, a été
le lieu privilégié d'un débat dans
lequel les acteurs qui sont en première ligne pour
la transformation des processus et l’élaboration
des politiques et des produits nouveaux ont fait part de
leurs expériences, difficultés, illusions
et parfois découragements.
20.
Si un consensus général s’est dégagé,
c’est bien la conviction largement partagée
que l'Europe souffre d’un déficit de souveraineté
qui est associé à ses insuffisances technologiques.
21.
Mais aussi s’est dégagé un consensus
sur le chemin permettant de relever ce défi : innover
dans des technologies stratégiques sans autres limites
que celles découlant du sens commun, ce grand outil
évolutif construit durant des milliers d'années
d'expérience. Ceci doit être placé au-dessus
des idéologies et des croyances au moment où
nous nous essayons à concevoir un avenir idéal
concernant ce grand rêve partagé qui nous a
réunis à Madrid, c’est-à-dire
l'Europe, notre Europe.
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