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Dossier
Le financement des sciences et technologies européennes
par
Jean-Paul Baquiast et Christophe Jacquemin
12 juin 2005 |
Ce dossier
comprend 4 articles:
Proposition
de priorités pour le développement scientifique
et technologique de l'Europe
Le
financement de la recherche par l'Union européenne
Le
financement de la recherche en France
L'ignorance
des nouvelles sciences par les gouvernements européens.
L'exemple des biocarburants
Proposition
de priorités pour le développement scientifique
et technologique de l'Europe
L’objectif
est d’abord d’obtenir un consensus sur les domaines
que les pays européens devraient s’accorder
à reconnaître comme prioritaires. Pour pouvoir
en discuter en termes d'enjeux politiques, économiques
et sociaux, il faut les énumérer. C'est l'objet
de cette note. Il faudra ensuite s'interroger, dans les
deux notes suivantes, sur les moyens budgétaires
intéressant la Recherche, au niveau du budget de
l'Union d'abord, au niveau français ensuite. Ceci
posera la question du financement public face au financement
privé et, en ce qui concerne le premier, celle du
redéploiement éventuel à partir d’autres
budgets devenus moins prioritaires.
Le classement retenu ici est évidemment artificiel.
Il ne doit pas faire oublier que les développements
sont convergents, au plan des techniques comme au plan géographique.
Priorité
1 : le contrôle des dépenses énergétiques,
le remplacement de l'énergie pétrole et charbon
par des énergies renouvelables, la lutte contre l'effet
de serre, la dépollution.
L'Europe est le bon élève du monde dans ce
vaste domaine. Elle doit le rester. Les recherches fondamentales
(RF) et les recherches/développement (RD) sont indispensables,
en amont des applications commerciales. Celles-ci, à
condition d'être aidées au démarrage
face au dumping des producteurs d'énergie traditionnels,
peuvent générer de nombreux emplois qualifiés
au niveau local (cf ci-dessous, l'exemple des
biocarburants).
On réservera la question de l'énergie nucléaire.
Certains pays continueront à mettre en place des
centrales de nouvelle génération et des modalités
de retraitement des déchets, d'autres non. Mais l'ensemble
des pays européens devra s'accorder pour soutenir
le nucléaire du grand futur, c'est-à-dire
le programme Iter d'expérimentation de la fusion
nucléaire.
Priorité
2 : les biotechnologies et leurs applications dans le domaine
thérapeutique humain et de la santé animale
et végétale.
L'Europe a de nombreuses ressources en ce domaine, qui intéresse
autant la biologie que la pharmacie et la chimie. Mais elle
prend du retard. Le poids de son budget social nécessitant
un allégement du coût des traitements, sa volonté
d'apporter à bas prix au tiers monde les molécules
dont celui-ci a besoin, lui imposent de redevenir pilote
dans ce vaste secteur.
On ajoutera au domaine les nanotechnologies. Celles-ci auront
de nombreuses applications concernant les matériaux
(voir ci-dessous), mais leurs applications thérapeutiques
pourraient également se révéler importantes.
Comme précédemment, les RF et les RD sont
indispensables dans le domaine, en amont des applications
commerciales. Celles-ci, à condition d'être
aidées au démarrage face à la concurrence
américaine et asiatique, peuvent générer
de nombreux emplois qualifiés au niveau local.
Priorité
3 : les sciences et technologies de l'information et de
la communication (composants, réseaux, informatique,
robotique, logiciels, intelligence artificielle, etc.).
On pourrait penser que face à l'avance abyssale prise
par les Etats-Unis dans ces divers secteurs, rejoints bientôt
par l'Inde et la Chine, l'Europe n'a plus qu'une solution,
acheter au plus bas prix possible les produits du marché.
Mais ce serait d'une part accepter une dépendance
scientifique, industrielle et militaire qui serait désastreuse,
d'autre part ignorer le fait que ces technologies évoluent
très vite et que des laboratoires ou entreprises
high tech européennes pourraient à tout moment
reprendre des créneaux de marché. On cite
souvent en exemple STMicroelectronics ou GemPlus, mais de
nombreuses PME fortement innovantes et créatrices
d'activités pourraient se développer si elles
étaient convenablement aidées au démarrage.
Des emplois de proximité en nombre importants, à
forte compétence, pourraient alors être crées,
autour de pôles géographiques associant la
recherche et l'industrie, comme le Minatec à Grenoble.
Priorité
4 : les industries culturelles, que Bernard Stiegler nomme
à juste titre les industries de l'intelligence.
L'Europe dispose d'une culture classique très diversifiée,
mais celle-ci est en voie de disparition face à l'invasion
des produits et contenus culturels importés à
partir du marché américain mondialement dominant.
Non seulement ceux-ci occupent de façon monopolistique
le domaine de la culture, bientôt celui de l'éducation,
mais ils véhiculent l'idéologie de consommation
permettant aux multinationales et aux lobbies militaro-industriels
américains de se répandre dans le monde.
L'Europe doit donc reprendre la main. Cela suppose des actions
à de multiples niveaux : celui de la RF et de la
RD pour maîtriser les nouveaux outils indispensables
aux nouveaux produits (réalité virtuelle et
intelligence artificielle, par exemple) – celui des
applications publiques intéressant notamment la numérisation
des patrimoines anciens et nouveaux - celui des applications
à destination commerciale (spectacles et jeux numériques,
par exemple). Une forte dose de préférence
culturelle (exception culturelle) sera sans doute aussi
jugée indispensable, au moins par les pays déjà
créateurs.
La relance de la création dans le secteur des industries
de l'intelligence mobiliserait un nombre considérable
d'activités, provenant soit du secteur public éducatif
et culturel, soit du secteur privé (techniciens et
artistes).
Priorité
5 : les sciences de l'ingénieur et les produits en
découlant (par exemple nouveaux matériaux,
nouvelles architectures, etc.).
Ce domaine, contrairement à une opinion répandue,
évolue vite et est porteur de nombreuses applications
où l'expérience des Européens est grande
et où les besoins sont nombreux. On pensera en particulier
aux grands travaux d'aménagement, aux grands réseaux
physiques transeuropéens, aux nouveaux types d'habitat
et d'implantation industrielle. Le domaine a-t-il besoin
d'être soutenu ? Sans doute lorsqu'il s'agit de secteurs
où les RF et RD s'imposent encore, par exemple dans
les nanomatériaux, les nouveaux états de la
matière (super-fluidité ou super-conductivité),
les produits dits intelligents…
Là encore, la création d'emplois de proximité
découlera quasi nécessairement de la mise
en place de chantiers grands ou petits faisant une part
aux nouvelles technologies
Hors
priorité: les applications civiles et militaires
de l'espace (cette
qualification signifiant que ce domaine, comme le domaine
militaire, non exploré ici, devra être développé
de toutes façons, si l'Europe ne veut pas disparaître
du nombre des puissances qui compteront au 21e siècle)
.
L'Europe dispose encore d'une certaine compétence
dans le spatial, mais celle-ci s'érode rapidement,
face à la politique américaine dite de «
full space dominance » et aux efforts de rattrapage
des puissances asiatiques : Chine, Japon, Inde.
La RF, la RD et les applications sont toutes à encourager.
On pourra cependant distinguer les secteurs des lanceurs,
des satellites civils scientifiques (d'observation de la
Terre notamment) et militaires, de l'exploration planétaire,
par vols robotisés puis habités.
Le domaine est essentiellement régalien. L'Agence
Spatiale Européenne est le principal porteur de l'impulsion
des Etats-membres. Mais ceux-ci doivent d'une part financer
ses programmes et d'autre part encourager des applications
et développements nationaux indispensables au maintien
de la compétence des laboratoires et des entreprises
spatiales.
On n'oubliera pas non plus que le spatial est fournisseur
(ou utilisateur, selon les cas) de la plupart des technologies
utilisées dans l'aéronautique et les nouveaux
vecteurs de transport, où l'Europe souhaite maintenir
une forte présence industrielle et commerciale, acquise
depuis plusieurs décennies.
L'ensemble du domaine aérospatial est fortement créateur
d'emplois qualifiés généralement regroupés
en pôles géographiques, mais pouvant, via les
équipementiers, être très décentralisés.
Le
lecteur demandera pourquoi un certain nombre de domaines
où divers pays européens disposent d'une bonne
compétence et de capacité de compétition
au plan international ne sont pas cités. Mentionnons
par exemple l'industrie pétrochimique, l'industrie
automobile, les industries agroalimentaires, les services…C'est
parce que les entreprises dans ces domaines disposent encore
de ressources suffisantes pour ne pas avoir besoin d'une
aide extérieure forte. Mais, comme indiqué
en introduction, les frontières artificielles résultant
de notre présentation ne doivent pas être considérées
comme correspondant à la réalité des
échanges. Ainsi l'industrie automobile s'intéressera
nécessairement aux nouvelles formes d'énergie
et aux nouveaux automatismes.
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Le
financement de la Recherche par l'Union européenne
(UE)
Aujourd'hui,
l'UE finance, essentiellement par le biais des Programmes
Communs de Recherche (PCR) ce que l'on appelle la recherche
pré-compétitive. Il s'agit de sélectionner
suite à des appels d'offres conduits par la Commission,
des programmes de R/D coopératifs (réunissant
plusieurs partenaires privés ou publics européens)
susceptibles de donner lieu à des applications commerciales.
Ces programmes ont donné lieu à certaines
réussites (par exemple en matière de télécommunication
ou d'environnement), ils ont permis par ailleurs la survie
de nombreux laboratoires ou PME innovantes, mais en général
leur rendement est faible au regard de leur lourdeur. Ils
ne sont pas non plus finalisés autour de grands projets
susceptibles de leur donner des retombées stratégiques.
De plus, ils excluent la recherche fondamentale (RF). Ils
ne permettent donc pas à l'Europe en tant que telle
d'entrer en compétition avec ses concurrents internationaux.
Pour mémoire, on mentionnera le programme européen
Eureka qui ne relève pas de l'UE mais fonctionne
selon les mêmes règles.
La recherche scientifique en Europe reste donc pour l'essentiel
de la responsabilité des Etats-membres et de leurs
entreprises, que ce soit au niveau de la RF, de la R/D ou
de la recherche industrielle. Mais les Etats peuvent coopérer
entre eux sur certains grands programmes, confiés
à des Agences ou Organismes co-financés par
ces Etats. On citera les plus connus l'Agence spatiale européenne,
le CERN ou l'Eso (European Southern Observatory). La tendance
actuelle est de rapprocher ces organismes de l'UE, pour
éviter les double-emplois.
Globalement, l'ensemble des financements publics et privés
de la recherche, relevant des Etats-membres et de l'UE,
n'atteint pas les 3% des PIB nationaux ou du PIB global
considérés comme le minimum indispensable
à la réalisation des objectifs dits de Lisbonne
(faire de l'Europe la société de la connaissance
la plus avancée au monde). Ces 3% sont d'ailleurs
aujourd'hui jugés insuffisants au regard de l'effort
consenti par les grandes puissances scientifiques, USA et
Japon notamment. Il faudrait atteindre au moins 4% des PIB
dans les prochaines années.
La Commission européenne, pour ce qui la concerne,
a proposé que la part de la recherche qu'elle finance
soit augmentée de quelques milliards sur 5 ans. Mais
si la plupart des Etats sont d'accord sur le principe de
cette augmentation, ils refusent d'augmenter leurs contributions
au budget européen, non plus que la répartition
des crédits au sein du budget global. Si cette position
n'est pas modifiée lors des discussions budgétaires
qui s'engagent à partir des prochains jours, le budget
global de la recherche en Europe n'augmentera pas et le
manque de compétitivité du Continent, déjà
constaté par tous les experts, s'aggravera encore.
Le
budget en cours d'exécution
Le financement de la R/D dans le cadre financier (budget)
européen venant à expiration en 2006 (Voir
http://europa.eu.int/comm/budget/pdf/financialfrwk/enlarg/tables_fr_publication_1.pdf
) s'impute sur un budget global qui comportera en 2006 les
grands postes suivants :
-agriculture 45,8 mds,
-fonds structurels et de cohésion 37,9 mds,
-politique internes (recherche et réseaux) 8,2 mds,
-action extérieure 6,5 mds,
soit au total 101 mds, soit 1,06 % du PNB de l'ensemble
des Etats membres.
Le
budget proposé par la Commission
Les
propositions de la Commission actuellement en discussion,
sont précisées par le projet de cadre financier
2007-2013 (voir http://europa.eu.int/eur-lex/lex/LexUriServ/site/fr/com/2004/com2004_0101fr01.pdf
)
Ce document rassemble les financements destinés à
la R/D dans une rubrique plus globale, significativement
intitulée " Compétitivité des
entreprises au service de la croissance et de l'emploi.
Réalisation des objectifs de Lisbonne". Cette
rubrique ne concerne pas seulement la recherche (intensifier
la R/D), mais des actions jugées connexes (interconnecter
l'Europe par les réseaux intercommunautaires, améliorer
la qualité de l'enseignement et de la formation).
En
ce qui concerne la recherche, l'objectif est d'augmenter
le budget qui lui est consacré de 8,7 mds en 2006
à 25,8 mds en 2013, le portant ainsi à 0,04%
du PIB. Les actions proposées sont nombreuses et
donnent une impression de désordre. Ceci tient à
ce qu'elles ne visent pas des projets précis bien
identifiés mais plutôt à mettre en réseau
(et en compétition en vue de l'excellence) le plus
grand nombre possible de laboratoires privés et publics
au sein des Etats-membres. On note cependant deux innovations,
le projet de création d'un Conseil européen
de la recherche (ERC) qui sélectionnera des projets
de chercheurs fondamentaux s'inscrivant dans certains directions
stratégiques et des actions ciblées visant
la mise en place de quelques infrastructures physiques (lasers,
sources de neutrons) et de plates-formes technologiques
public-privé sur le modèle de l'Initiative
de croissance européenne. Il s'agira d'encourager
l'innovation dans les entreprises (piles à combustibles,
nano-électronique,), les pôles d'excellence
européens et enfin des réseaux européens
spécifiques dans le domaine notamment de l'Espace
(GMES) et de la Sécurité.
Globalement,
les autres grands postes du futur cadre financier évolueront
de la façon suivante, de 2007 à 2013 :
- Cohésion : 38 à 50,9 mds
- Gestion durable, agriculture, pêche, environnement
: 56 à 57,8 mds
- Citoyenneté, justice, divers, 1,3 à 3,6
- Action internationale 11 à 15,7
Soit au total une augmentation de 114,7 mds en 2007 à
143 mds en 2013, c'est-à-dire un budget évoluant
de 1,09% des PIB en 2007 à 1,15% en 2013.
Qu'en
penser ?
La
lecture de ces simples chiffres, à supposer qu'ils
soient acceptés par les Etats-membres (ce qui n'est
pas le cas actuellement) montre que l'Europe est en train
de sacrifier sa future compétitivité scientifique
technologique et industrielle faute de financer à
niveau convenable les actions nationales et communautaires
pouvant aller dans ce sens.
Les partisans de la construction européenne déplorent
non sans raison le rejet probable du TCE, qui selon eux
retardera de plusieurs décennies la construction
d'une Europe politique. Mais ils ne s'alarment pas du fait
que la construction d'une Europe de la connaissance, de
la science, de la technologie et des industries compétitives
est d'ores et déjà condamnée par l'absence
de volonté des Etats-membres.
Ceux-ci
pourraient-ils faire mieux ? Oui mais en acceptant d'orienter
le budget européen – à supposer qu'il
soit difficile de l'accroître dans l'absolu de façon
significative - dans des directions radicalement différentes.
Le problème à poser est le suivant : l'essentiel
du budget européen est consacré à des
actions politiques visant à conserver des avantages
acquis (essentiellement dans le domaine agricole) ou à
faciliter l'adaptation des nouveaux membres ou des régions
dites défavorisées, au total 94 mds. La recherche
ne dispose que de 6 mds environ.
Ceci veut dire que l'Europe (telle que voulue par ses membres
et non pas telle que souhaitée par la Commission
ou le Parlement) se tourne entièrement vers le passé
et refuse d'investir pour l'avenir. Il s'agit à nos
yeux d'une solution inacceptable, beaucoup plus grave pour
l'avenir de l'Europe, nous venons de le dire, que le rejet
du TCE.
La Commission, nous l'avons vu, demande un léger
correctif, se traduisant par une augmentation du budget
global en 2013 (143 mds) et une petite augmentation de l'aide
à la recherche (25,8 mds). Mais d'une part, cette
demande sera probablement rejetée par les Etats-membres,
notamment la France et l'Allemagne. D'autre part, elle serait
de toutes façons insuffisante.
La
seule solution assurant l'avenir serait de prélever
des sommes substantielles (10 mds dès 2006 et 25
à 50 mds en 2013), sur la cohésion et sur
la gestion durable (agriculture), afin de les affecter à
la recherche. Comment faire accepter ce transfert par les
Etats-membres défenseurs de leurs clientèles
politiques ? Il faudrait montrer que les nouvelles dépenses
de R/D financées par l'augmentation du budget de
recherche (RF et R/D réunies) pourraient en grande
partie servir aux objectifs intéressant la gestion
durable et la cohésion, mais aussi qu'ils pourraient
aider les régions défavorisées et les
nouveaux membres à se doter des laboratoires et des
PME innovantes qui leur manquent encore. Ainsi au lieu de
financer des actions qui se perdent dans l'obscurité
des politiques économiques régionales, ces
dépenses financeraient des actions clairement visibles,
créatrices d'emplois d'abord, de valeurs ajoutées
à terme et finalement de croissance.
On
voit que dès cette année, le gouvernement
français, qui affirme ne pas renoncer à la
construction européenne, aura une lourde responsabilité.
Aujourd'hui, il refuse l'augmentation du budget européen
demandé par la Commission et refuse que l'on touche
aux crédits de la politique agricole commune. Il
refuse donc par définition l'augmentation du budget
de la R/D européenne. Acceptera-t-il, pour relancer
la croissance et l'emploi comme il proclame par ailleurs
vouloir le faire, de changer de position ? Ce faisant il
risquerait de s'aliéner le vote des agriculteurs
en 2007, surtout s'il ne s'explique pas clairement à
leur égard. Par contre, il bénéficierait
peut-être de soutien dans les milieux de la recherche
et de l'innovation industrielle).
En ce qui concerne l'opposition socialiste en France, elle
se trouvera devant le même dilemme. Si elle proposait
d'augmenter comme indiqué ci-dessus les budgets de
recherche européens, elle risquerait de s'aliéner
les votes agricoles (à supposer que certains agriculteurs
votent à gauche) mais elle serait approuvée
par les milieux de la recherche. Les partis de gauche européens
n'auraient il est vrai pas la même difficulté.
Ils sont en général hostiles aux crédits
de la politique agricole commune. Voir ceux-ci diminuer
ne les affecterait pas. Par contre, certains soutiennent
les actions de cohésion et auraient du mal à
justifier leur réduction auprès de leurs électeurs.
Les responsables politiques de droite comme de gauche et
avec eux les électeurs européens sont donc
aujourd'hui à la croisée des chemins. Ou bien
continuer dans la ligne actuelle et accepter le dépérissement
de l'Europe, ou bien en finançant la recherche engager
résolument l'Europe (et ses alliés du tiers-monde)
dans la bataille du demi-siècle pour la survie, face
aux grands ensembles géopolitiques qui ne leur veulent
aucun bien.
Le
dilemme exposé ici se retrouve en ce qui concerne
le financement de la recherche dans les budgets nationaux.
Nous examinerons cette question dans l'article suivant
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Le
financement de la recherche en France
Partout
dans le monde, on distingue généralement deux
sources de financement de la recherche, celui des entreprises
et celui des collectivités publiques, régions
et Etats. Le premier s’intéresse par définition
à des recherches dites recherche/développement
(RD) susceptibles d’applications commerciales. Mais
les entreprises puissantes réalisent en leur sein
un certain nombre de recherches fondamentales (RF) supposées
améliorer à terme leur capacité compétitive.
Le financement de la recherche publique vise soit des objectifs
stratégiques jugés d’intérêt
général où se conjuguent la RF et la
R/D (militaire, spatial), soit des objectifs de RF qui sans
le secteur public ne seraient pas assurés. Pour simplifier,
on dira que la RF sur financement public vise à la
connaissance et le long terme, mais légitimement
elle n’est pas dépourvue de perspectives applicatives.
Le financement de la recherche privée, vise en priorité
la réalisation de produits et services susceptibles
d'être vendus sur un marché mondial soumis
à la concurrence d'entreprises dominantes généralement
non-européennes.
Les
grands pays européens consacrent à la recherche
environ 2% de leur PIB, ce qui est inférieur aux
sommes consacrés par les Etats-Unis et le Japon.
Ceci pose immédiatement la question de savoir pourquoi
ils ne font pas davantage. De plus, l’origine des
crédits de recherche distingue la France de ses autres
partenaires. La France a traditionnellement été
l’un des pays européens qui affectait le plus
de ressources publiques à la recherche. Ses voisins,
notamment la Grande Bretagne et l’Allemagne, disposent
d’une recherche privée plus importante que
la recherche publique. La recherche publique française
se répartit entre celle destinée à
des objectifs finalisés que l’on qualifiera
de «puissance» (nucléaire, aérospatial,
océanographie, militaire) et des objectifs «désintéressés»,
couvrant une vaste gamme d’activités depuis
la physique fondamentale jusqu’aux sciences sociales
et humaines et dont le CNRS a été jusqu’ici
le coordinateur emblématique.
Le
modèle français pourrait être exemplaire
dans une Europe se donnant un grand dessein géopolitique
car il illustre bien les domaines dans lesquels l’initiative
publique, voire régalienne, doit intervenir. Il présente
cependant une faiblesse. C’est le peu d’enthousiasme
des grandes entreprises françaises pour la recherche
privée. Celles-ci semblent avoir pris depuis longtemps
l’habitude de s’en remettre à l’Etat
pour financer les recherches non rentables, se contentant
d’en récupérer les bénéfices.
Une autre lacune grave du modèle français
est le manque d’intérêt de l’épargne
privée, qui cependant existe, pour le financement
des start-up innovantes. De plus, les financements privés
de la recherche s’intéressent davantage à
des secteurs relativement sûrs, comme la cosmétique
et l’agroalimentaire, plutôt qu’aux domaines
émergents.
La crise du modèle français
Ce
modèle se caractérisait par le soutien de
l’Etat à la recherche, qui prenait trois formes
principales :
- Une importante activité de recherche fondamentale,
coordonnée par de grands organismes au premier rang
desquels le CNRS.
- Des grands programmes industriels civils et militaires
confiés à des établissements publics
et comportant une importante part de recherche fondamentale
et appliquée.
- L’existence de chercheurs «fonctionnaires»
ayant l’avantage de la stabilité pour se consacrer
à des objectifs de long terme mais peu enclins à
l’évaluation et à la mobilité,
notamment du public vers le privé.
A
l’inverse, la recherche privée (conduite dans
les entreprises) n’a jamais eu de rôle majeur.
Les entreprises qui finançaient des recherches le
faisaient surtout en retombée de leur participation
aux grands programmes publics. Le milieu bancaire pour sa
part ne s’est jamais vraiment intéressé
au financement de la recherche, jugé trop risqué.
Le
modèle français subit une crise grave, qui
a commencé dans les années 1980, et qui est
due à plusieurs phénomènes concourants
:
- Le recul sinon l’abandon du concept de l’Etat,
représentant l’intérêt général
et capable d’impulser de grandes orientations et grands
projets intéressant la souveraineté nationale.
- Le manque croissant d’intérêt pour
la science et la technologie, reposant à la fois
sur le manque de culture scientifique entraînant ignorance
des enjeux chez les représentants politiques et des
peurs plus ou moins fondées (principe de précaution,
crainte du changement) de plus en plus répandues
dans l’opinion.
- La diminution des recettes fiscales, résultat de
la crise économique de ces dernières années,
qui s’est traduite par la réduction des budgets
publics consacrés à la recherche. Il s'agissait
là d'une solution de facilité d'autant plus
facile à prendre que les décideurs mésestimaient
l’importance de la science et, par ailleurs, ne voyaient
pas dans les chercheurs une clientèle électorale
intéressante.
De
plus, la recherche privée n’a pas pris le relais
de la dépense publique et n’a pas permis à
la France d’atteindre le niveau de financement privé
consacré à la R/D par les pays voisins. La
concurrence internationale a de plus en plus affaibli ou
fait disparaître les entreprises capables de financer
des recherches. Par ailleurs, la mauvaise habitude consistant
à compter sur l’Etat pour financer la recherche
n’a pas suscité dans l’économie
l’apparition notoire de nouvelles formes d’investissement
de recherche (business angels et capital-risque aidant les
PME innovantes par exemple).
Ceci
a provoqué deux phénomènes en réaction,
plutôt heureux : d’une part la «révolte
des chercheurs» de l’été 2004
et d'autre part un début de prise de conscience de
la perte de compétitivité de l’industrie
faute de recherches dans les domaines stratégiques
nouveaux. Mais si le mal français a été
en général dénoncé et un diagnostic
formulé, les remèdes sont loin d’être
encore mis en œuvre.
Un
diagnostic
Il est difficile d'espérer un diagnostic consensuel
dans un domaine aussi difficile. Cependant, nous pouvons
ici, sans grands risques semble-t-il, en formuler les grandes
lignes :
- La crise de la recherche en France va bien au-delà
d'une simple revendication statutaire ou budgétaire
formulée par les chercheurs publics. Il s’agit
d'un problème de fond. Pour la plupart des économistes
et scientifiques, l'avenir de la société française,
et derrière elle celle de la société
européenne est en cause. La France et l'Europe sont
en train de "décrocher", aujourd'hui, vis
à vis des Etats-Unis, demain du reste du monde :
Chine, Japon, etc.
- Sans recherche fondamentale, il ne peut y avoir de croissance
durable. L'Union européenne doit définir une
stratégie mais les pays européens seuls ou
en constituant des groupes pionniers dans tel ou tel domaine
doivent contribuer aussi à l'effort. Niveau européen
et niveau national doivent se compléter.
- Sans initiative publique forte et continue, relayée
ensuite par le secteur privé, il ne peut y avoir
de développement de la recherche fondamentale. Grâce
à leurs agences de moyens et en particulier à
la NSF, qui doit être considérée comme
un modèle, les Américains pratiquent avec
succès cette politique depuis longtemps. Mais il
ne faut pas séparer la science de la technologie.
Les deux sont étroitement liées dans les sociétés
modernes. Elles sont les deux éléments d'un
système complexe qui commande l'évolution
de la société. En France, l’Agence Nationale
de la Recherche pourrait jouer le rôle de la NSF,
mais il faudrait qu’elle dispose de moyens suffisants.
Par ailleurs, il convient de protéger les budgets
de recherche des aléas de la conjoncture. A cet égard,
il est essentiel de les soustraire aux contraintes du pacte
de stabilité.
- L'approche par grands programmes mobilisateurs est indispensable
pour finaliser les principaux investissements. De nouveaux
programmes doivent prendre le relais des anciens venus en
bout de course. Ces programmes pourraient et parfois devraient
être initialisés et plus particulièrement
soutenus en France (ex : Galiléo et plus généralement
le spatial, Iter…). Mais la dimension européenne
est indispensable au niveau des grandes avancées
pour des raisons de taille critique. Le problème
du "décrochage", à l'exception de
quelques pays de l'Europe du Nord, n'est pas propre à
la France, il est celui de l'ensemble de l'Europe. L’approche
européenne n’exclue pas, au contraire la valorisation
du nouveau rôle des Régions dans la réalisation
de réseaux d'excellence, englobant nos meilleurs
centres de recherche et universités.
- Les retombées de la R/D au profit de l’économie
et plus généralement la mobilisation des entreprises
en faveur de leurs propres moyens de recherche doit se faire
dans la perspective d’une politique industrielle affirmée.
En amont, cela suppose entre autres la mise en place et
surtout le financement à niveau convenable de la
future Agence de l’innovation industrielle. En amont,
cela supposera des mesures de protection des nouveaux investissements
contre les abus de position dominante exercés par
les multinationales non-européennes.
- Un effort sans précédent en faveur de la
culture scientifique et technique doit être engagé
en particulier en France, pays qui depuis de longues années
développe une culture de défiance à
l'égard de la science, des scientifiques et des chercheurs.
Il est à craindre que la conception européenne
du principe de précaution n'entrave très fortement
la recherche, en particulier dans un domaine essentiel comme
celui des cellules souches.
- D’une façon générale, sans
volonté politique, rien ne peut se faire. Celle-ci
fait aujourd'hui cruellement défaut. Il est à
noter que beaucoup de chercheurs, de sensibilités
très diverses, se réfèrent au colloque
de Caen (1956) et à la politique du Général
de Gaulle.
La
nécessité d’Etats-Généraux
de la Recherche
Le gouvernement s’est engagé dans la rédaction
d’un projet de Loi sur la Recherche dont on ne sait
pas encore grand-chose mais qui suscite déjà
de nombreuses déceptions anticipées. On n’en
discutera pas ici. Par contre, il faut évoquer, outre
celles résumées ci-dessus, les nombreuses
questions, souvent objets de controverses, qui continuent
à se poser concernant la recherche en France. Beaucoup
de chercheurs ou d’observateurs ont souhaité
que ces questions soient discutées dans des Etats-Généraux
de la Recherche, que malheureusement ni les Pouvoirs Publics
ni les partis de l’opposition ne semblent désireux
d’organiser.
Evoquons ces questions dans le désordre :
- Les difficultés quotidiennes des chercheurs, la
précarité, l'expatriation et le retour, etc..
On rangera dans cette catégorie la demande, ultra-justifiée,
de budgets (si possible en hausse régulière)
sur 5 à 10 ans, sans à-coups d'une année
sur l'autre et n'imposant pas des procédures administratives
excessivement lourdes. Le milliard d’euros par an
promis par le gouvernement au début de l’année
2005 sera-t-il versé et renouvelé pendant
au moins 3 ans ?
- La transparence et l'évaluation : on ne sait pas
toujours ce que font les laboratoires, à quoi ils
utilisent leurs moyens, quels sont leurs projets actuels,
que souhaiteraient-ils faire s'ils avaient davantage de
moyens. Il s'agit d'un aspect particulier de l'évaluation,
qu'on appellera l'évaluation citoyenne et plus généralement
la communication avec la société. Nous avons
ici plusieurs fois constaté le manque de bonne volonté
des laboratoires à faire connaître ce qu'ils
font et voudraient faire. Avec l'Internet, ce serait pourtant
facile. On ne peut pas parler d'Etats Généraux
de la recherche si on ne dispose pas d'un état des
lieux précis montrant ce que font les gens, ainsi
que de bilans réguliers coûts-résultats.
On ne peut pas non plus intéresser les médias
à ces questions sans un effort constant pour aller
au devant d'eux.
- La publication des résultats. On rejoint là
la question de l'évaluation professionnelle. Par
exemple, il est quasi impossible de connaître les
résultats et les suites des appels d'offre lancés
par les grands organismes, notamment le CNRS. C'est absolument
anormal.
- La réforme de la tutelle, la nécessité
ou pas d'un grand ministère détaché
de l'éducation nationale. A qui le rattacher ? Le
rattachement au Premier ministre paraît indispensable.
De même, la nomination auprès du Président
de la République, comme dans certains pays de tradition
anglo-saxonne, d'un Conseiller National à la Recherche
serait sans doute très utile.
- L'enseignement des sciences. La question est généralement
peu posée, sauf par quelques Prix Nobel. Elle est
essentielle. L'enseignement doit commencer par le secondaire.
Dans l'université, la question de savoir si le chercheur
doit enseigner se pose également. On peut penser
que le manque de goût (caché par l'argument
du manque de temps) des chercheurs pour l'enseignement est
un aspect particulièrement dangereux de leur manque
d'intérêt pour la communication. Un aspect
particulier a été évoqué, celui
de la formation des étudiants du tiers-monde. Celle-ci
pourrait se faire de plus en plus en travail partagé
via Internet.
- Faut-il s'inspirer ou non des méthodes de gestion
de la recherche des Etats-Unis, souvent reprises avec succès
par le Royaume Uni et les pays scandinaves ? Mais ceci n’imposerait
pas du tout l’abandon du modèle français
de la coordination par les grands organismes. Ceux-ci, notamment
le CNRS, devraient cependant être « dépoussiérés
», ouverts notamment aux sciences émergentes.
Mais on ne pourra pas le faire dans une ambiance déflationniste
marquée par la baisse continue des crédits,
surtout dans les secteurs nouveaux (voir par exemple la
disparition programmée du programme Robea en robotique).
On
rappellera pour finir la nécessité d’une
prise de conscience, que ce soit dans le privé comme
dans le public, des impératifs de l’intelligence
économique. Il conviendra notamment de veiller au
poids et aux formes parfois insoupçonnés de
la domination américaine dans tous les domaines,
et surtout dans les sciences émergentes.
Sans
faire de démagogie, on terminera en rappelant que
l'austérité budgétaire sert souvent
de prétexte à cacher le manque de priorité
attribuée à la science par les Pouvoirs Publics
français. Personne ne peut croire que les quelques
milliards qui seraient nécessaires à l'amélioration
de la situation des chercheurs et à la relance de
certains programmes de recherche dans les grands organismes
ne puissent être trouvés, ne fut-ce que par
redéploiement.
Recherche et développement
en France : quelques chiffres
par
Christophe Jacquemin
Effectif
de la recherche dans l'hexagone

Source : Direction de l'Evaluation
et de la Prospective (DEP) - Bureau B3 - du
ministère de l'Education nationale,
de l'Enseignement supérieur et de la
recherche
La
France compte 186 420 chercheurs (hors défense)
dont 91 126 travaillant dans le secteur privé
(chiffres 2002) pour un effectif total dans
le secteur Recherche et Développement
français (hors Défense) de l'ordre
de 339 800 personnes (en équivalent
temps plein recherche (ETP). Les chercheurs
représentent donc un peu plus de la
moitié de leffectif total. Le
secteur privé emploie davantage de
personnel, mais seulement 50% des chercheurs.
56% des personnels travaillant pour les activités
de R&D (hors défense) sont rémunérées
les entreprises et 44% par les administrations.
Source : Direction de l'Evaluation
et de la Prospective (DEP) - Bureau B3 - du
ministère de l'Education nationale,
de l'Enseignement supérieur et de la
recherche
Les
régions Ile-de-France, Rhônes-Alpes
et Provence-Alpes-Côte d'Azur concentrent
plus de 60% des effectifs (respectivement
132 400, 36000 et 21000 personnes).
Au regard des autres pays européens
et du monde, la France manque de chercheurs.
Ainsi (chiffres 2002), on compte 5,49 chercheurs
en Grande-Bretagne pour 1000 actifs ; 6,2
en France, 6,45 aux Etats-Unis ; 8,08 aux
Etats-Unis ; 9,1 en Suède ; 9,26 au
Japon ; 13,08 en Finlande.
L'effectif
des administrations en matière de recherche
et de développement est de 148 600
personnes (en équivalent temps plein
- ETP). Les chercheurs ou enseignants chercheurs
représentent 49% de cet effectif, les
boursiers de thèse 12% et le personnel
de soutien à la recherche 39%.
L'employeur le plus important est l'université,
avec 59 800 ETP, dont 32 600 enseignants chercheurs.
Le CNRS rémunère 29 700 ETP
et les autres Etablissement publics de recherche
à caractère scientifique et
technologique (EPST) 20000, avec 8700 pour
l'INRA et 6600 pour l'INSERM. Dans les EPIC
(Etablissement à caractère industriel
et commercial), on compte quelque 22 550 ETP,
dont 11200 pour le CEA, 2600 pour le CNES,
1900 pour l'ONERA, 1500 pour l'Ifremer, 1400
pour l'ISRN...
La part des femmes parmi les chercheurs est
plus élevée d'environ 10 points
dans la recherche publique que dans les entreprises.
En 2002, 32% des chercheurs de la recherche
publique sont des femmes, avec des différences
notables selon les organismes, en raison des
spécialisations disciplinaires. Dans
l'université et les EPST, un directeur
de recherche ou professeur d'université
sur cinq est une femme, alors qu'on dénombre
2 femmes sur 5 parmi les chargés de
recherche ou maîtres de conférences.
Le taux de féminisation des boursiers
de thèse atteint 40%.

Source : Direction de l'Evaluation
et de la Prospective (DEP) - Bureau B3 - du
ministère de l'Education nationale,
de l'Enseignement supérieur et de la
recherche
Recherche
et financement
Les dépenses françaises
en R&D sont passé de 1,9 à
2,2% du PIB en 10 ans. Un grand pas reste
à faire pour atteindre l'objectif des
3% décidé en 2000, lors du Sommet
de Lisbonne.
Part
de la recherche dans le PIB

Avec une dépense intérieure
de recherche et de développement (DIRD)
de 34,5 milliards d'euros en 2002, le financement
de la recherche en France s'effectue selon
le rapport des 2/3-1/3 entre la recherche
privée et publique. Le poids du public
reste très important en comparaison
avec d'autres grands pays.
En consacrant uniquement 1,99% de son PIB
à l'investissement en R&D, l'Union
européenne est encore à la traîne
par rapport à ses principaux concurrents,
le Japon (2,98%) et les Etats-Unis (2,8%)
[chiffres 2001]

Source : OCDE - Base de
données MSTI, mai 2004
Administrations

Source : Direction de l'Evaluation et de la
Prospective (DEP)
Bureau B3 -
du ministère de l'Education nationale,
de l'Enseignement supérieur et de la
recherche
En 2002, la dépense intérieure
de recherche et développement des administrations
(DIRDA) s'élève à 12,7Md
d'euros et représente 0,83% du PIB.
-
La
R&D civile & défense
En 2002, le montant de la DIRDA civile (dépense
de R&D des administrations hors DIRD du
ministère de la Défense en direction
des organismes publics) est de 11,5 Md d'euros,
ce qui représente 90,9% du total de
la dépense intérieure des administrations
et militaires.
- La
recherche dans les administrations
Elle regroupe 3 grands domaines ou secteurs
institutionnels :
- Administrations publiques (organismes publics
de recherche, services ministériels)
: 59%
Elle comprend la recherche dans les établissements
publics à caractère scientifique
et technologique (EPST), les établissements
publics à caractère industriel
et commercial (EPIC) ainsi que la Recherche
des services ministériels.
En 2002, les administrations publiques civiles
ont dépensé 6,71 Md d'euros pour
la Recherche et employé près de
77 5000 personnes, dont 40 700 chercheurs, ingénieurs
de recherche et boursiers
- Enseignement supérieur (Universités
et grandes écoles) : 37 %
Dans l'enseignement supérieur, l'activité
de recherche représente 4,4 Md d'euros.
Elle emploie 64 500 personnes, dont 47000 chercheurs
et bousiers.
- Associations et fondations : 4%
Le secteur des institutions sans but lucratif
a réalisé pour 0,5 Md d'euros
de travaux de recherche en 2002.
Plus des quatre cinquièmes des ressources
de la recherche publique sont de nature budgétaire.
Celles-ci sont issues à hauteur de 56%
du budget civil de recherche et de développement
(BCRD) auxquelles il faut ajouter la partie
du budget de l'Enseignement supérieur
qui finance des activités de R&D,
notamment les salaires des enseignants-chercheurs
pris à 50% (soit 21% des ressources budgétaire)
et le budget de R&D de la défense
(20% des ressources budgétaires totales).
Les ressources contractuelles et les autres
ressources propres complètent le financement
de la recherche publique.
Entreprises
Source : Direction de l'Evaluation et de la
Prospective (DEP)
Bureau B3 -
du ministère de l'Education nationale,
de l'Enseignement supérieur et de la
recherche
En 2002, la dépense intérieure
de recherche et de développement dans
les entreprises implantées sur le territoire
national (DIRDE) s'élève à
21,8 Md d'euros (dont 2,5 Md provenant d'un
financement public*). En 2003, la DIRDE est
estimée à 21,2 Md d'euros, correspondant
à une baisse en volume de 4,2% par rapport
à 2002.
En 2002, les 200 entreprises les plus importantes
en termes de dépense réalisent
66% des travaux de R&D. Elles emploient
55% des chercheurs et 56% des effectifs totaux
de recherche.
5 activités regroupent 58% du potentiel
de recherche et de développement des
entreprises et 54% des personnels R&D, même
si ces parts relatives dans le total ont régulièrement
décru depuis 1992.
*
industrie automobile : 15 millions d'euros (meuros);
Equipements de communication : 337 meuros ;
:industrie pharmaceutique : 15 meuros ; construction
aéronautique et spatiale : 1, 223 milliard
d'euros ; Instruments de précision :
354 meuros ; Industrie chimique : 32 meuros
; Service de transport et communication : 8
meuros ; Machines et équipements : 286
meuros ; Autres branches industrielles : 126
meuros ; Autres branches de services : 2,499
milliards d'euros
|
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sommaire
L’ignorance
des nouvelles sciences par les gouvernements européens.
L’exemple des bioressources et des biocarburants.
On ne répétera jamais assez à quel
point l’ignorance des perspectives offertes par les
nouvelles sciences empêche les gouvernements européens
de proposer des solutions politiques permettant à
l’Europe de s’opposer avec succès à
la compétition sans cesse accrue des Etats-Unis,
de la Chine et de l’Inde.
Nous en avons un exemple très actuel avec la question
du budget européen, actuellement discutée
au niveau intergouvernemental. La plupart des gouvernements
souhaiteraient légitimement une augmentation de la
part du budget communautaire consacré à la
Recherche (voir ci-dessus #4)
mais ils refusent l’augmentation du budget global
qui serait nécessaire. Ils refusent simultanément
le redéploiement interne de crédits, au profit
de la Recherche, qui pourraient se faire à partir
des deux principales masses affectées au sein du
budget communautaire à la politique agricole commune
et aux Fonds structurels et de cohésion. Ceci veut
dire que concrètement tout accord sur le budget des
cinq prochaines années se fera au détriment
de la Recherche et donc, à très court terme,
au détriment de l’avenir de l’Europe.
Or des solutions différentes pourraient être
négociées avec toutes les parties prenantes
si l’on tenait compte des perspectives offertes par
les nouvelles sciences. Prenons l’exemple des bioressources,
notamment des biocarburants qui pourraient être produits
à partir du traitement de produits agricoles. On
peut comprendre que le gouvernement français veuille
défendre à Bruxelles l’avenir des filières
agricoles, qui représentent une valeur compétitive
certaine pour la France, notamment en terme d’emplois
et d’exportation. Mais ce qu’il ne semble pas
vouloir admettre, c’est qu’il y aurait désormais
des façons plus intelligentes de le faire que s’accrocher
à la sacro-sainte politique agricole commune, même
remaniée, qui nous fâche avec presque tous
nos partenaires, puisque les agriculteurs français
en sont les seuls principaux bénéficiaires.
On
sait que, depuis une dizaine d’années, des
progrès considérables ont été
faits dans le domaine essentiel des biotechnologies. Ils
permettent, de l’avis même des professionnels,
d’assurer que « d’ici 20 à 30 ans,
30% des cultures pourraient être consacrées
à du non-alimentaire » (Jacques Siret, président
de l’Organisation nationale interprofessionnelle des
oléagineux, Onidol). Ceci est considérable
quand on considère que le retraitement des productions
agricoles en faveur des bioénergies et des biomatériaux
viendra directement en allégement de la dépendance
au pétrole qui va affecter de plus en plus lourdement
les économies européennes. Il permettra aussi
de diminuer la production des gaz à effet de serre.
(ci contre:
Culture de colza, image Le Monde)
Mais
si l’avenir des bioressources industrielles est si
important, il mérite d’être encouragé
et défendu mieux que par les « mesurettes »
actuellement mises en œuvre par certains Etats ou proposées
par la Commission. La France se félicite du fait
que six nouvelles usines d’éthanol et de diester
vont être construite d’ici à 2007 (voir
Le Monde http://abonnes.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3228,36-660546@51-660661,0.html).
C’est mieux que rien mais c’est très
peu et très tardif par rapport à ce qu’il
faudrait si l’on voulait faire de l’agriculture
un secteur véritablement compétitif par rapport
au secteur pétrolier. Surtout quand on sait que,
comme tous les domaines émergents, les nouvelles
activités supposent des aides au démarrage
substantielles, tant au niveau budgétaire qu’en
ce qui concerne la protection réglementaire.
De telles aides devraient en bonne logique venir non seulement
des Etats mais du budget européen. L’avenir
de la filière biocarburant et bioressources est un
enjeu qui n’intéresse pas seulement la France
mais tous les pays y compris ceux ayant progressivement
renoncé à une agriculture de subsistance.
Les crédits correspondants devraient donc être
prélevés principalement sur les quelques 55
mds par an qu’il est prévu de consacrer à
l’agriculture et aux activités connexes. Autrement
dit, on pourrait envisager que 10% environ de ce budget
dans les prochaines années soient retirés
à l’agriculture d’aujourd’hui et
d’hier, afin d’être consacrés aux
activités ago-industrielles de demain.
Il est presque certain qu’en France, les représentants,
toujours très actifs, de la profession, qui font
actuellement pression sur le Président de la République
pour qu’aucun changement ne soit apporté à
la PAC, pourraient admettre de telles perspectives. Mais
il faudrait que ce virage important soit convenablement
négocié, tant avec eux qu’avec les autres
pays, les autres intérêts industriels et finalement
les autorités de Bruxelles. Si le Président
de la République et son gouvernement avaient été
plus sensibilisés qu’ils ne le sont aux perspectives
des biotechnologies et des biosciences, il y a longtemps,
comme au Brésil et aux Etats-Unis, leaders dans la
production du bioéthanol, qu’ils auraient fait
prendre cette direction nouvelle à notre pays. Cela
n’a pas été le cas et risque de ne pas
l’être avant longtemps.
Nous avons retenu ici l’exemple des bioressources.
Mais bien d’autres domaines technologiques, parfaitement
ignorés par notre gouvernement et généralement
d’ailleurs par leurs homologues des autres pays européens,
mériteraient la même attention. Nous en sommes
loin. Au lieu de construire une Europe conquérante,
ces gouvernements se borne à tenter de défendre
des positions de plus en plus intenables. 12/06/05
*
Onidol http://www.prolea.com/onidol/
* AGRICE: agriculture pour la chimie et l'énergie
http://www.ademe.fr/partenaires/agrice/htdocs/present01.htm
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